L'Algérie est face à une véritable menace sur sa sécurité alimentaire. Un danger triangulaire nous guette. Il s'agit de la désertification galopante qui risque d'engloutir 30 millions d'hectares supplémentaires, induisant ainsi un recul de l'agriculture qui n'arrive pas à couvrir les besoins en consommation, importés à hauteur de 70% du marché extérieur. Les spécialistes demandent une réaction urgente pour réduire ce risque. En plus de la nécessité de multiplier les efforts pour endiguer le phénomène de la désertification, ces derniers insistent sur l'importance de réaliser une synergie entre l'agriculture et l'industrie agroalimentaire pour subvenir aux besoins de consommation nationale qui ne cessent d'augmenter. La sécurité alimentaire et l'approvisionnement en eau potable risquent d'être compromis à long terme si rien n'est fait. Le phénomène de la désertification pèse telle l'épée de Damoclès sur l'Algérie comme sur d'autres pays du monde. Les chiffres communiqués, à la veille de la célébration de la journée mondiale de lutte contre la désertification (17 juin) par la direction générale des forêts (DGF) sont alarmants. Erosions, pertes de sédiments, glissements de terrain et avancée du désert… au moins 30 millions d'hectares des terres arables du territoire national sont aujourd'hui plus que jamais menacés par la désertification. Selon le rapport de la DGF, 12 millions d'hectares sont soumis à l'érosion hydrique dans les zones montagneuses, dont 47% des régions les plus érodées se situent à l'ouest du pays. Le rapport, rendu public hier, évoque aussi la perte de 120 millions de tonnes de sédiments/an et une diminution des capacités de stockage des eaux de barrages avoisinant les 20 millions de m3/an. Ce qui risque de réduire encore davantage les capacités, déjà insuffisantes, pour subvenir aux besoins nationaux en la matière. « La sédimentation de certains barrages a atteint un taux qui avoisine les 100% », précise la même source. Ce sont les régions steppiques (dans les Hauts-Plateaux et l'ouest du pays) qui sont les plus menacées. Représentant près de 36 millions d'hectares, 20 millions d'hectares relevant du domaine de la steppe sont aujourd'hui vulnérables à la désertification. « Alors que 600 000 hectares sont désertifiés, 7 millions d'hectares relevant de la steppe sont sérieusement menacés par l'érosion éolienne », précise le document de la DGF. En plus de l'avancée du désert, la DGF souligne également un autre problème relatif au glissement du terrain (16,6 m3 érodés/an) dû à la déforestation. Malgré les efforts consentis jusque-là, à travers le projet du barrage vert lancé en 1971 et les différentes campagnes de reboisement lancées ces dernières années, la superficie forestière demeure insignifiante. Elle ne représente, selon le même rapport, que 1,7% du territoire national, dont 11% se situent dans la région nord du pays. La situation est la conséquence de plusieurs facteurs. En sus du climat et de l'avancée du désert (200 millions d'hectares représentent le Sahara), la DGF cite en particulier le facteur humain. L'exploitation irrationnelle des terres, notamment dans les régions steppiques et la destruction des forêts favorisent le phénomène de la désertification. Soulignant la nécessité de conjuguer les efforts au niveau de tous les secteurs, la DGF rappelle les objectifs du programme d'action national (PAN) pour la lutte contre la désertification. Le PAN vise, indique la même source, le développement durable de l'écosystème steppique. « Cet objectif est réalisable à travers la diminution de la population tirant sa subsistance de l'exploitation extensive des zones classées sensibles, la création d'opportunités d'investissement non désertifiant pour les capitaux actuellement utilisés dans l'élevage steppique, et également une recherche scientifique et technique proposant des techniques agricoles et pastorales à effet désertifiant faible », précise la DGF. Pour la reconstruction du patrimoine forestier, la DGF cite encore la campagne de reboisement consacrée comme tâche « d'intérêt national » et qui se traduit par une mobilisation des citoyens et la mise en œuvre d'un vaste programme d'investissement. « Ces programmes et cette campagne ont permis la plantation, de 1962 à 1970, de plus de 99 000 ha », indique-t-on.