L'Algérie est-elle en passe d'emboîter le pas au berceau du hooliganisme qu'est la Grande-Bretagne ? Fort possible, si l'on tient compte de la violence qui tend à s'incruster dans nos terrains de football. Les incidents qui ont émaillé les dernières rencontres en sont la preuve. Ce phénomène devient encore plus inquiétant et pose un problème de sécurité publique dès lors que la violence déborde de l'enceinte sportive, comme on a dû le constater après les récents matches ayant regroupé le CRB et l'USMA et le MC El Eulma et l'ASM Oran. Pour les différentes institutions de l'Etat, l'heure est encore au diagnostic. La réflexion, croit-on savoir, est engagée à plusieurs niveaux de responsabilité. Comment et par quel moyen peut-on réduire ce phénomène à défaut de l'éradiquer complètement ? Faut-il renforcer le dispositif juridique existant en mettant en place un arsenal plus répressif ? Faut-il réglementer l'accès au stade en interdisant l'accès aux mineurs non accompagnés ? Ce sont autant de questions auxquelles les autorités se doivent d'apporter des éléments de réponse dans les meilleurs délais. L'échec des commissions Du côté du ministère de la Jeunesse et des Sports, on affirme que la violence dans les stades n'est pas un fait nouveau ni même un problème spécifique à l'Algérie. De tout temps, les autorités avaient essayé plusieurs approches pour endiguer ce phénomène. Il y a eu d'abord le efforts déployés par le comité national de la coordination intersectorielle pour la prévention de la violence dans les enceintes sportives. Ce comité, créé en 1994, a entrepris, selon Abdeladhim Belbekri, inspecteur général auprès du MJS, plusieurs actions pour réduire la proportion de la violence dans les stades. Parmi les mesures proposées, figurait, entre autres, la mise en place d'un dispositif législatif plus répressif. Néanmoins, ces mesures ne se sont pas traduites sur le terrain par des effets positifs. Pour sa part, la Ligue nationale de football avait décidé d'instituer une commission de lutte et de prévention contre la violence dans les stades. Cette commission devait associer d'autres institutions et organismes, notamment la DGSN et les comités de supporters. Néanmoins, l'échec des instruments précédemment mis en place a ramené le MJS à revoir sa copie et à réflechier sur de nouvelles méthodes. Pour ce faire, un état des lieux a été dressé et un rapport a été finalisé. « Nous avons essayé d'analyser sommairement ce phénomène pour prendre les mesures qui s'imposent », a souligné M. Belbekri. Pour lui, la violence s'exprime dans les stades pour diverses raisons. L'anonymat et l'impunité qu'offrent les tribunes du stade, le regroupement d'une masse importante de jeunes et de moins jeunes, l'insuffisance des infrastructures sportives, les erreurs d'arbitrage, le manque de formation des arbitres, la défaillance dans l'encadrement managérial des équipes de football, le comportement de certains dirigeants de club et l'attitude, pour le moins négative, d'une certaine presse, sont autant de facteurs qui mettent souvent le feu aux poudres. Comment peut-on maîtriser cette violence ? « Il faut associer toutes les parties concernées », dira M. Belbekri. Pour ce dernier, deux thérapies sont à même d'atténuer la violence dans les stades. Il s'agit de la thérapie pénale qui suppose, selon lui, le renforcement du dispositif législatif existant et de la thérapie éducative qui englobe aussi bien le chapitre de la sensibilisation que celui de l'éducation. La part du mouvement associatif Ces deux approches, affirme notre interlocuteur, ont été abordées dans la nouvelle loi relative à l'éducation physique et sportive, en l'occurrence la loi 04-10, qui a remplacé l'ordonnance 95-09 relative à l'organisation des activités sportives. Outre le côté pris en charge par le code pénal, cette loi a introduit de nouveaux délits et permis la création de nouvelles organisations à même de contrôler le mouvement des foules dans les enceintes sportives. Cette batterie de mesures, souligne notre interlocuteur, doit, toutefois, être accompagnée d'autres efforts, notamment de la part du mouvement associatif, des arbitres, des joueurs, des comités de supporters, des présidents de club... Selon le responsable du MJS, il sera également question de relancer et de redynamiser certains organismes, tels que les comités de wilaya chargés de la préparation des rencontres, les associations de jeunesse ainsi que la formation des stadiers. S'agissant du volet lié à l'éducation et à la sensibilisation, ce chapitre devra être pris en charge dans le cadre de la réforme de l'école, notamment par la revalorisation des disciplines d'éveil, comme l'EPS. « Il faut enseigner aux élèves l'éthique sportive, la maîtrise de soi, le fair-play afin de redonner au sport les vertus qui sont siennes », a conclu M. Belbekri.