Selon l'OMS, la contrefaçon de médicaments représentait, en 2006, environ 10% du marché pharmaceutique mondial, soit environ 45 milliards d'euros. Les médicaments achetés via internet, sur les sites qui dissimulent leur véritable adresse, sont contrefaits dans plus de 50% des cas. Dans certains pays d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine, jusqu'à 30% des médicaments disponibles sur le marché peuvent être des contrefaçons. En Europe, 2,7 millions de produits pharmaceutiques ont été saisis en 2006, en nette augmentation par rapport à 2005. Paris. De notre envoyée spéciale La contrefaçon de médicaments prend des proportions alarmantes à travers le monde. Après avoir marqué son évolution dans les pays en voie de développement, ce phénomène profilère à une vitesse vertigineuse dans les pays développés, notamment en Europe. Ce qui peut toucher de plein fouet de nombreux pays d'Afrique du Nord dont les principales importations de médicaments proviennent de l'Union européenne. L'alerte a été donnée jeudi dernier par l'European federation of pharmaceutical industries and associations (efpia). Elle qualifie la contrefaçon d'activité criminelle hautement lucrative. Ainsi, un appel est lancé à l'Union européenne afin de prendre des mesures fortes pour combattre la contrefaçon de médicaments, notamment en interdisant leur reconditionnement. « Il est urgent que l'Europe joue un rôle moteur dans la lutte contre ces activités criminelles », a martelé Jean François Deheq, vice-président de l'European federation of pharmaceutical industries and associations et président de Sanofi-Aventis. Pour lui, « les réseaux organisés de contrefacteurs de médicaments, qui opèrent à l'échelle internationale et jouent avec des vies humaines au nom du profit, doivent être démantelés par des actions implacables, des poursuites systématiques et des sanctions civiles et pénales appropriées », a-t-il indiqué avant de préciser que les statistiques de l'UE, publiées le 19 mai dernier, révèlent qu'un total de 4081 millions d'unités de produits médicaux ont été saisis aux frontières douanières de l'UE, en 2007. « Ceci constitue une augmentation de 51% par rapport à 2006 », a-t-il ajouté au cours d'une conférence de presse organisée en marge du meeting annuel de l'EFPIA. M. Dehecq a rappelé qu'au début du mois de juin, un vaste laboratoire clandestin de médicaments, destinés notamment à des malades atteints du cancer, a été découvert près de Lyon. « Plusieurs mètres cubes de faux médicaments ont été saisis », a-t-il précisé en soulignant l'« urgence » de la situation. La première mesure à prendre est, selon lui, l'interdiction du reconditionnement des médicaments qui est « une voie royale pour écouler les produits contrefaits ». Il a déploré au passage le système d'importation parallèle qui est légal en Europe. Ceci consiste à importer puis à distribuer le médicament d'un Etat membre dans un autre pour profiter des différences de prix fixés au niveau national. Il estime que les enquêtes de police doivent être renforcées pour améliorer leur efficacité et mettre en place « un arsenal pénal qui vaille la peine ». Les lois actuellement en vigueur dans l'Union européenne prévoient que les médicaments puissent être reconditionnés ou ré-étiquetés après avoir quitté le site de production. Ainsi, les comprimés peuvent être retirés de leurs blisters et reconditionnés. Cela signifie que les efforts consacrés à la mise en place d'éléments de sécurité sur les emballages de médicaments « sont inutiles », a-t-il dénoncé. Par ailleurs, le vice-président de l'Efpia estime que le développement d'éléments de sécurité sur l'emballage d'un médicament constitue une composante essentielle de toute stratégie anticontrefaçon efficace. Ainsi, son organisation est sur le point de proposer un projet pilote de système de code barre unique qui permettra aux pharmaciens de vérifier chaque boîte avant de la dispenser au patient. Ce projet baptisé « Data matrix » sera, selon M. Dehecq, lancé d'ici 2009 en Allemagne. « Ce qui bloquera sûrement les contrefacteurs », a-t-il assuré en précisant que ce procédé peut être généralisé à tous les pays. En attendant la réussite de ce système, les malades sont de plus en plus exposés au danger de la contrefaçon.