La rencontre de Djeddah qui a regroupé hier les pays producteurs de pétrole et les pays consommateurs aux côtés des institutions internationales et des grandes compagnies pétrolières a pris fin sur une note d'optimisme malgré les divergences qui sont apparues. C'est ainsi que les participants à la conférence ont adopté une déclaration qui indique la voie à suivre pour surmonter la crise actuelle que vit le marché pétrolier et qui déstabilise les politiques gouvernementales, les empêchant d'avoir une vision dans leur démarche budgétaire. Après avoir été habitué durant longtemps à un pétrole pas cher et à des prix des carburants qui ont favorisé une consommation effrénée, le réveil est brutal. La consolidation des prix de pétrole ces dernières années a entraîné dans son sillage la hausse des prix des carburants partout dans le monde au grand dam des consommateurs. Coté autour de 25 dollars le baril au début des années 2000, le baril de pétrole s'est installé au-dessus de la barre des 130 dollars porté par des problèmes géopolitiques à l'issue incertaine, un déficit en capacités de raffinage et une grande spéculation qui ont fait que le baril de pétrole soit pris en otage par la Bourse à cause, notamment, de la crise des crédits immobiliers et du recul historique du dollar. La divergence principale apparue dans les positions a été évacuée au profit d'un consensus de principe énoncé dans plusieurs points de fond dans la déclaration. L'Arabie Saoudite, qui est le seul pays de l'Opep à disposer de capacités excédentaires, a fait un effort en annonçant une augmentation de la production faite à la demande de clients.En réalité, cette augmentation vient suppléer l'incapacité de certains pays producteurs à atteindre leur quota de production pour des raisons internes ou techniques, à l'image du Nigeria, dont la production subit des coupes à chaque fois qu'une installation de production est attaquée par des groupes armés dans le Delta du Niger. Dans son allocution d'ouverture, le roi Abdellah a appelé les participants à rechercher les véritables causes de la hausse continue des prix de pétrole en créant un groupe de travail mixte, composé de représentants des pays producteurs et consommateurs, de l'Opep, de l'Agence internationale de l'énergie et du Forum international de l'énergie. Pour le roi Abdellah, la hausse des prix de pétrole est due à la spéculation, l'augmentation de la demande et l'augmentation des impôts sur les produits pétroliers. Pour illustrer les efforts de son pays, il a fait savoir que la production saoudienne de pétrole est passée de 9 millions de barils par jour à 9,7 millions ces derniers mois. Le seuil de 9,7 millions de barils par jour entrera en vigueur au mois de juillet. Sur un autre registre et pour dissiper les inquiétudes des consommateurs, le ministre saoudien du Pétrole, Ali El Nouaimi, a déclaré que son pays pouvait porter ses capacités de production de pétrole à 15 millions de barils par jour, en indiquant que les inquiétudes concernant un risque de pénurie de pétrole à l'avenir sont totalement injustifiées. Les capacités de production de l'Arabie Saoudite atteindraient les 12,5 millions de barils par jour à fin 2009 auxquelles s'ajouteraient des projets qui totaliseraient 2,5 millions de barils par jour et qui pourraient être réalisés si la demande venait à être justifiée, selon le ministre saoudien. Ces déclarations constituent une sorte d'annonce pour le marché marqué par la peur de la pénurie de pétrole. Une psychose très utilisée par la spéculation. Actuellement, les capacités de production de l'Arabie Saoudite seraient de 11,3 millions de barils par jour. Ce qui donne un excédent disponible de 1,6 million de barils par jour. La déclaration finale qui a fait consensus recommande une meilleure transparence et une plus grande régulation des marchés financiers et un accroissement des capacités de production et de raffinage afin d'assurer un fonctionnement efficace du marché pétrolier. Sur ce plan, la responsabilité des producteurs et des consommateurs est engagée pour un objectif commun qui préserve les intérêts des uns et des autres et cela évite la méthode de la « culpabilisation » qui empêche le débat serein et la recherche des meilleures solutions pour stabiliser le marché. Avant l'ouverture de la conférence, les divergences sont apparues lorsque le secrétaire américain à l'Energie, Samuel Bodian, avait déclaré qu'il n'y avait « aucune preuve que la spéculation financière conduise les prix », appelant les pays producteurs à augmenter leur production. A l'opposé et exprimant le point de vue des pays producteurs membres de l'Opep, le ministre de l'Energie et des Mines et président de l'organisation a rappelé la demande américaine, faite au Fonds monétaire international, de l'élaboration d'une étude sur l'effet de la spéculation sur le marché mondial de pétrole brut. Dans une déclaration à la presse avant l'ouverture de la rencontre, le ministre avait rappelé la position de l'Opep, à savoir que la hausse actuelle des prix ne dépendait pas des fondamentaux du marché dans la mesure où l'offre était suffisante pour couvrir la demande et que cette hausse était due à la spéculation sur les marchés financiers, les facteurs géopolitiques, le recul du dollar et le repli des capacités de production du diesel. Le président de l'Opep a fait aussi savoir qu'aucune décision d'augmentation de la production n'est programmée et que le marché sera examiné lors de la prochaine réunion de l'organisation le 9 septembre prochain. Mis à part la confirmation de la décision de l'Arabie Saoudite, aucune augmentation de la production n'a été annoncée lors de la réunion d'hier. Finalement et malgré les divergences d'approche, la rencontre a pu permettre un débat et des échanges qui peuvent faire avancer les choses afin de préserver les intérêts des producteurs et des consommateurs.