La crise du mont Eglon, région située à l'ouest du Kenya, est un conflit des plus oubliés. Depuis 2006, la population vit quotidiennement les massacres de la police et des forces d'une milice locale, celle des Forces de défense des terres des Sabots (SLDF). Ce groupe a commencé à prendre les armes en août 2006 à cause, selon lui, du partage inégal des terres agricoles. Au début, il s'en prenait aux paysans et faisait du racket auprès de la population. Leur terre et le matériel agricole sont brûlés. Puis les réprimandes se sont aggravées : violences, viols, tortures. Les hommes ont les oreilles coupées par les pangas (machettes) ou étaient simplement décapités, les femmes sont violées. De leur côté, les forces de police pratiquaient les mêmes violences pour trouver les miliciens du SLDF. Cette population subit la journée les exactions des forces de police et la nuit ce sont les forces du SLDF qui prennent le relais. Au mois de mars dernier, les forces de sécurité sont arrivées dans cette région pour traquer les miliciens du SLDF. Les regains de violence se sont aggravés, entraînant un autre déplacement de la population. Médecins sans frontières, l'unique ONG sur place, vient de rendre un rapport édifiant sur les agissements de l'armée. Les militaires arrivaient dans un village et emmenaient dans une base militaire avec eux tous les hommes âgés plus de 15 ans. Pendant environ trois jours, ils étaient privés de nourriture et subissaient des humiliations dans le but qu'ils dénoncent les membres du SLDF. Ils étaient frappés à coups de barre de fer. Tous ont subi des sévices sexuels. Les militaires les obligeaient les uns les autres à se frapper sur les organes génitaux. « Beaucoup d'hommes sont devenus stériles depuis. Tous sont traumatisés par les actes qu'ils ont subis. Ils ont des traumatismes psychologiques », a noté Lisette Shuker, la reportrice du rapport de Médecins sans frontières (MSF). Au bout de ces quelques jours de torture, les militaires les ramènent au village. Un rapport de l'Unité médico-légale indépendante (IMLU), sorti au mois d'avril, a accusé l'armée d'avoir torturé plus de 4000 personnes. Ces victimes souvent revivent une deuxième fois ces exactions sommaires. Pour l'autre camp, celui du SLDF, elles sont considérées comme des traîtres et des délateurs. Les miliciens arrivent. Sauf que les rebelles n'utilisent pas de barre en fer, mais des machettes. Ces forces s'en prennent également aux femmes et massacrent tout sur leur passage.Depuis le début de la crise, plus de 66 000 personnes ont été déplacées. Elles se cachent sur les hauteurs du mont Eglon, à plus de 3000 mètres d'altitude. Elles vivent sans abris alors que les nuits sont froides, surtout en saison hivernale. Ils n'ont plus rien : leurs terres et leur matériel agricole ont été brûlés par les miliciens du SLDF. Dans son rapport, Médecins sans frontières tire la sonnette d'alarme sur l'urgence humanitaire dans cette région. A cause de ces conditions déplorables, les maladies sont nombreuses et l'aide pas suffisante.