LE CAIRE - Benghazi, fief des rebelles, a célébré l'adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU d'une résolution en faveur d'un recours à la force en Libye en proie à la violence depuis plus d'un mois tandis qu'à Bahrein la répression de la contestation s'est poursuivie jeudi. A l'issue de trois jours de négociations, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté une résolution jeudi soir autorisant à prendre "toutes les mesures nécessaires" pour protéger les civils et imposer un cessez-le-feu à l'armée libyenne, y compris des frappes aériennes, mais précise qu'il n'est pas question d'occupation militaire. Elle prévoit aussi une zone d'exclusion aérienne pour empêcher l'aviation du colonel Mouammar Kadhafi de pilonner ses opposants. Le vice-ministre libyen des Affaires étrangères, Khaled Naaim, a aussitôt réagi estimant que cette résolution constituait un "appel aux Libyens à s'entretuer". Il a toutefois indiqué que la Libye était prête pour un cessez-le-feu contre l'insurrection mais avait "besoin d'un interlocuteur bien précis pour discuter de sa mise en oeuvre". Auparavant, le leader libyen avait annoncé que les forces gouvernementales allaient attaquer dans la soirée de jeudi Benghazi, à un millier de km à l'est de Tripoli, dans un message sonore retransmis par la télévision libyenne. Mais plus tard dans la nuit, CNN a affirmé avoir reçu un appel d'un des fils de Kadhafi, Seif Al-Islam, selon lequel le colonel Kadhafi aurait changé de tactique pour des raisons humanitaires et ne prévoyait plus d'entrer dans la ville de Benghazi dans l'immédiat mais de prendre position autour. A Benghazi, la décision de l'ONU a été accueillie par des tirs de joie et des coups de klaxons dans les rues. Plusieurs centaines de jeunes se sont rassemblés devant le siège du Conseil national de transition, l'instance dirigeante mise en place par les insurgés, pour célébrer l'événement. A Bahreïn, la répression de la contestation s'est poursuivie jeudi, après l'intervention en début de semaine de troupes de pays du Golfe, l'instauration de l'état d'urgence et un assaut contre des manifestants chiites mercredi à Manama (cinq morts). Quelques centaines de personnes ont tenté de manifester dans le village de Deih, à l'ouest de Manama, mais les policiers ont tiré au fusil de chasse et lancé des grenades lacrymogènes sur les protestataires. Six personnalités de l'opposition ont en outre été arrêtées. Amnesty International a dénoncé "le recours systématique" à "une force excessive" pour réprimer les manifestations. Les appels à une solution politique lancés par Washington, allié de Bahreïn, sont restés lettre morte dans cet archipel majoritairement chiite dirigé par une dynastie sunnite. Pas de répit des violences non plus au Yémen, où des milliers de personnes campent à Sanaa depuis le 21 février pour obtenir le départ du président Ali Abdallah Saleh. Au moins 20 manifestants ont été blessés lors de heurts avec des partisans du régime soutenus par la police, selon des sources médicales et des témoins. L'opposition parlementaire a accusé le pouvoir de "crimes contre l'humanité", dénonçant une répression à l'aide de "balles réelles" et de "gaz toxiques prohibés". Trois policiers et trois membres présumés d'Al-Qaïda ont par ailleurs été tués lors d'affrontements jeudi dans la province de Marib (est), et un chef local du réseau extrémiste a été arrêté. Enfin, la France a "condamné" les violences contre les manifestants en Syrie, où une trentaine de personnes ont été arrêtées mercredi à Damas lors du deuxième rassemblement en 24 heures pour réclamer davantage de libertés. Et en Algérie, le 49e anniversaire du cessez-le-feu qui a mené à l'indépendance sera marqué samedi par une marche des jeunes à Alger pour un changement de régime.