Quelle que soit l'issue de l'affaire Strauss-Kahn, la France est perdante sur tous les plans. Il ne peut y avoir aucun bénéficiaire de l'arrestation et de l'inculpation de Dominique Strauss-Kahn. La France est perdante sur tous les plans. Colportant à travers le monde le cliché insupportable du "womaniser" tricolore, cette affaire submerge par ses ravages les arcanes de la vie politique nationale. D'abord parce que ce scandale affecte l'image d'un pays qui s'escrime à maintenir le deuxième réseau diplomatique mondial (après celui des Etats-Unis), à exercer une influence planétaire sans proportion avec son poids réel, à entretenir un "soft power" fondé sur une culture de l'élégance, à exprimer haut et fort son attachement aux principes humanitaires, maître mot de son rayonnement. Combien de résolutions 1973 (celle qui a autorisé l'opération aérienne en Libye) faudra-t-il pour compenser le dommage subi? C'est au nom de cette ambition -franchement exigeante- que Strauss-Kahn, mis au rang de chef d'Etat, avait accepté de prendre les rênes du FMI -tâche dont il s'était, du reste, acquitté avec succès. Avant lui, les Français Pierre-Paul Schweitzer (1963-1973), Jacques de Larosière (1978-1987), Michel Camdessus (1987-2000) avaient occupé le même fauteuil, faisant de la France la nation la plus représentée à la tête de cette institution depuis sa fondation. Une grande tradition saccagée C'en est fini; une grande tradition est saccagée. D'autant que le recul global de l'influence européenne au sein du FMI était déjà souhaité par les pays émergents. Nicolas Sarkozy avait pourtant bien pris soin, en proposant Dominique Strauss-Kahn à ce poste, de mettre en garde l'intéressé contre tout dérapage sur le sol américain, peu propice à l'indulgence en matière de moeurs... Le fait que DSK ne soit pas taillé pour la fonction présidentielle est presque dérisoire par rapport aux effets que produit cette évidence sur l'image de toute une nation.