Fatima et Malika natives de Bejaia ignoraient totalement le mot d'ordre de grève lancé le 9 mai dernier par les cheminots. Hier, elles se sont présentées, normalement, à la gare centrale pour embarquer. Quelle fut leur surprise en trouvant une barrière de sécurité devant l'entrée principale et les travailleurs assis discutant de l'avenir de leur entreprise. « Ce sont 400.000 dinars de perte sèche pour la SNTF », dira l'un d'eux, ne sachant pas quand le débrayage prendra fin. Fatima dira que depuis la mise en service de l'autorail où la sécurité et le confort sont assurés, elle fait souvent la navette entre Alger et Bejaia. En quittant la gare, désabusées, les deux jeunes femmes ont été approchées par un transporteur clandestin. Apparemment, l'activité de ce chauffeur de « taxi » ne dépasse pas les frontières de la wilaya d'Alger. Alors, elles ont pris la résolution de prendre le bus à la gare routière du Caroubier. Fatah est un autre habitué du train. Sa destination est Hussein Dey. Comme les deux clientes précédentes, il n'a pas suivi l'actualité. Ne voulant pas arriver à son rendez-vous en retard, il s'est engouffré dans le premier taxi clandestin. A Tafourah, les bus et les taxis sont assaillis par les voyageurs. Dès qu'un bus arrive, une bousculade incroyable et sans précédent est vécue par les usagers. Idem pour les taxis. Certains chauffeurs n'ont pas encore tiré le frein à main et les occupants pas sortis encore, que les taxis sont assaillis par une nuée de clients arrachant presque la poignée de la porte. La majorité d'entre eux étaient des usagers des trains. A la gare de l'Agha, deux jeunes étudiantes à l'Ecole normale supérieure devant se rendre à Lakhdaria (de Bouira) furent déçues de ne pas emprunter le train jusqu'à Thénia. Elles sont contraintes de prendre le car d'Alger jusqu'à Rouïba et changer de bus jusqu'à Thénia pour ensuite aller à Lakhdaria. « Cela va durer toute la journée, car il n'y pas d'autres solutions », dira l'une d'elles. Au niveau de cette gare, une cellule de crise a été mise en place pour suivre l'évolution de ce débrayage « Tout le trafic ferroviaire est gelé et ce, à l'échelle nationale » affirmé un employé.«Nous sommes environ 10.000 cheminots qui observons la grève jusqu'à la satisfaction de notre principale revendication », a enchaîné un autre membre de la cellule de crise.