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Hassi Messaoud : loin de la rumeur..
Publié dans Horizons le 01 - 06 - 2010

Beaucoup de femmes originaires du nord du pays font le déplacement à Hassi Messaoud pour travailler dans les bases de pétrole. Elles louent des maisons dans les quartiers populaires. Elles y habitent seules, en groupe ou avec leurs enfants. Elles mènent une vie paisible. La nuit tombée, il est déconseillé, toutefois, pour elles et pour les hommes aussi de se hasarder dans les dédales d'El Haicha, au trente sixième ou au quarantième, quartiers les plus réputés, au risque d'être agressés, de perdre son argent, son portable comme partout ailleurs. En cette belle journée de la fin du mois de mai, il fait très bon à Hassi Messaoud. La chaleur torride n'a pas encore fait son apparition dans cette ville qui abrite quelques 60 000 âmes, le soir surtout quand la fraîcheur se mélange aux senteurs de la nuit. Dans la pénombre, les torches de feu de pétrole veillent sur la petite ville, la plus riche en Algérie et la troisième en Afrique.
Les klaxons et le bruit des véhicules se font à peine entendre pour ne pas perturber le silence de la nuit. Les conducteurs ne semblent pas stressés comme à Alger ou dans d'autres grandes villes du pays. Car ici, point d'encombrements. Conduire est un véritable plaisir à Hassi Messaoud. Les magasins, les cafés et les restaurants restent ouverts jusqu'à tard le soir.
Les passants flânent au gré de leur plaisir ou de leurs affaires. Leurs narines se délectent des odeurs délicieuses de la viande grillée, des cacahuètes et du thé qui coule à flot. Des hommes, des enfants mais aussi…des femmes qui vaquent tranquillement à leurs occupations. Et…à 21h du soir. Sans presser le pas. Sans tourner la tête de peur d'un quelconque ou éventuel danger. Sereines, paisibles et très discrètes dans leurs tenues vestimentaires, elles traversent le grand boulevard de Hassi sous le regard presque indifférent des «mâles».
Certes, ces dernières ne sont pas nombreuses. Comme d'ailleurs dans toutes les villes d'Algérie. La nuit, c'est connu, c'est le royaume des hommes. Les femmes ne s'y aventurent que rarement. Quand elles sont obligées et souvent, se font accompagner. Et la ville de Hassi Messaoud ne fait pas exception et ce, malgré la présence de plus de 70 nationalités étrangères et une population locale qui porte la marque des 48 wilayas du pays. Hassi Messaoud reste conservatrice. Traditionnelle. Tradition qu'elle exprime d'une façon particulière et avec force dans ses quartiers populaires, conçus l'un à proximité de l'autre. A El Haîcha dit aujourd'hui avenue Bouamama, au 36e, au 1800 et au quarantième. Ici, dans les quartiers populaires, en dehors de la grande avenue de Hassi, les femmes ne sortent pas au delà de 20h. Pourtant, ce ne sont pas les femmes qui manquent ici. Beaucoup d'entre elles sont étrangères à la ville. Elles viennent surtout de l'ouest du pays en quête de travail dans les bases de pétrole. Elles louent des maisons dans ces quartiers populaires et y habitent parfois en groupe, seules ou avec leurs enfants. Ici, le loyer n'est pas aussi cher que dans le reste de la ville. Il est à 8000 DA/mois en moyenne.
Certains habitants de la ville qualifient ces quartiers de «dangereux», le soir. Des visiteurs étrangers peuvent «perdre» leur téléphone portables ou leur argent. Les femmes peuvent être agressées pour les mêmes raisons ou pour d'autres. «Je ne sors pas le soir au delà de 20h. Je fais mes courses et je rentre aussitôt chez moi, Cela fait neuf ans que j'habite à Hassi, je n'ai jamais, personnellement, connu de problèmes ou été victime d'agression. Mais je préfère être prudente en rentrant chez-moi à une heure raisonnable. Les femmes qui sortent seules tard dans la nuit, sont mal vues par ici, comme partout d'ailleurs,», confie l'une des habitantes du quartier 1800e, originaire de Saida, travaillant comme hôtesse au VIP de l'Aéroport de Hassi Messaoud. «Ce sont des quartiers comme les autres. La vie y est tout à fait normal, avec des hauts et des bas», dit-elle.
Des femmes font du sport, la nuit
Une centaine de femmes sont adhérentes au club sportif «Abtales el Djanoub» à Hassi Messaoud. Elles font de l'aérobic, le stretching et le step. Elles commencent à 17h et terminent à 20h. «Nous avons entre 100 et 300 femmes de tout âge qui font du sport dans notre club. Elles sont souvent accompagnées de leurs familles mais parfois, rentrent à la fin de la séance chez-elles en taxis», affirme le secrétaire général du club.
Des commissariats au cœur des quartiers populaires
Le soir, les quartiers de Hassi vibrent de vie. Sous les lampes de grands lampadaires, on peut apercevoir les «fils» des quartiers qui déambulent tranquillement, se réunissent parfois autour d'un café ou d‘une bonne tasse de thé. Certains effectuent même la prière de l'Ichaâ en pleine rue, sur le sable. Au cœur des quartiers el Haïcha et du 36e, deux commissariats de la sûreté urbaine se dressent dans l'ombre, projetant des lumières blafardes sur les habitations. «Je suis née ici, grandi ici, effectué ma scolarité ici. Ça m'arrive de sortir le soir, faire des courses notamment, et j'avoue que je me sens plus en sécurité ici qu'à Alger. Il est clair que dans les quartiers populaires, c'est dangereux de sortir la nuit. Comme à Alger», confie une étudiante habitant Hassi, en dehors des quartiers populaires.
Cela dit, ceci ne signifie pas pour autant, font remarquer des agents de la sûreté de la Daïra, que la ville est à l'abri des agressions. Comme toutes les villes au monde, Hassi a certes sa part de quiétude et de paix mais aussi sa part de violence. «A Hassi, il y a des femmes qui sont victimes de violence mais des hommes aussi.
Contrairement à ce qu'on a affirmé dans les journaux, nous faisons notre travail, surtout le soir, et les patrouilles nous les effectuons 24h sur 24h pour la protection des habitantes et des habitants. Toutefois, avec tous nos efforts, il est évident qu'on ne peut pas deviner si agression ou délit auront lieu ou pas. Mais on est toujours prêt à intervenir. D'autant plus qu'on est implanté au cœur d'un quartier populaire et à proximité d'autres quartiers», affirme le commissaire de la sûreté urbaine à El Haîcha.
«En 2010, nous n'avons enregistré que deux plaintes de viol. Mais le médecin qui les a examinés a conclu dans son rapport à un non viol. Ces femmes ne portaient aucune lésion. Nous avons ouvert des enquêtes. L'une des victimes a retiré sa plainte. L'autre par contre a persisté malgré les conclusions du médecin légiste. Après investigation, on a découvert que cette dernière était versée dans la débauche et faisait du chantage à ses clients», explique le commissaire en exhibant des documents prouvant ses dires. Pour sa part, l'un des agents de la sûreté de la Daïra, fait savoir que quatre plaintes d'agressions verbales ont été déposées aux premiers mois de l'année. «Des femmes ont été violemment interpellées par des jeunes. Mais n'ont pas été agressées physiquement. Elles ont porté plainte et la justice suit son cours», dit-il. « Ce sont, ajoute-t-il, des cas isolés comme on n'en voit partout dans les grandes villes. «Mais on n'a pas vu de cagoule, de sabre ou de hache comme cela a été rapporté par certains journaux», et d'expliquer, «Quand il s'agit de faits divers, les gens ont tendance à entretenir les rumeurs. Ça devient des racontars. Chacun imagine ce qu'il veut et raconte ce qu'il veut. Cela fait trois ans que je suis ici et je trouve que Hassi est plutôt une ville tranquille», assure-t-il. Des propos que le lieutenant à la protection civile, Madjid Khedim, confirme tout en relevant toutefois qu'un drame a failli avoir lieu en 2004 dans l'un des quartiers populaires. «Les femmes qui ont été agressées en 2001, elles l'ont été parce que leurs attaquants les soupçonnaient de s'adonner à des activités douteuses et jugeaient qu'elles avaient mauvaise réputation. En 2004, on a tenté de s'en prendre encore une fois à ces femmes mais pour toutes autres raisons. Les habitants de ces quartiers ne voyaient pas de bon œil que des femmes venues d'ailleurs trouvent du travail et pas eux, des hommes qu'est plus est», dit-il.
• Pas de policiers en uniforme
A Hassi Messaoud, le feu rouge est respecté sans avoir recours aux policiers en tenue. Ces derniers d'ailleurs, ne sont nulle part à Hassi, sauf à l'aéroport et aux commissariats de sûreté urbaine implantés dans la ville depuis 2004. «C'est une zone sécurisée. Les policiers à Hassi, qui effectuent notamment les patrouilles, que ce soit la nuit ou le jour, sont des civils», explique l'un des représentants de la Daïra.


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