La guerre confessionnelle fait rage en Irak. Six mois après la retraite américaine, l'héritage sanglant du GMO à feu et à sang continue de peser sur le destin chaotique du « free Iraq » voué au démembrement et à la guerre civile incessante. Depuis le départ des troupes US, une dizaine d'attentats ont été commis particulièrement dans la capitale qui vit quotidiennement l'enfer des bombes. Le déchaînement de violence a atteint son apogée, sur fond de crise politique, dans la série d'explosions qui ont visé les 6 villes (El Hilla, Al Maîdane, El Kadhimiya, Kirkouk, Mossoul). Elles ont toutes été revendiquées par El Qaïda fédérant, sous l'appellation Etat islamique d'Irak, les groupes armés. Le bilan tragique (72 morts et 250 blessés), l'un des plus lourds depuis les attentats anti chiites de Baghdad et Nassiriyah, attise les tensions confessionnelles et communautaires. Cette flambée haineuse a une symbolique : la célébration de l'anniversaire de la mort du 7e imam, Moussaal-Kacem, le 18 juin, par les pèlerins chiites affluant de toutes parts. Le quartier chiite de Kadhimiyah où devaient se dérouler les cérémonies a été ciblé. Hier, la cérémonie, entamée sur le parvis du mausolée de l'imam, a renoué avec l'enfer des bombes dans le quartier nord de Baghdad, en dépit des mesures de sécurité draconiennes. Au moins, 32 personnes ont été tuées et une centaine d'autres blessées dans un attentat à la voiture piégée visant des pèlerins chiites dans le nord de Bagdad, selon une source du ministère de l'Intérieur. Le scénario du pire est ainsi redouté pour cette fin de la semaine qui est le point culminant des manifestations chiites. Mais, assurément, les graines de l'horreur et du désastre global sont semées dans un pays qui s'enfonce dans la crise. Depuis 6 mois, le bras de fer qui oppose le gouvernement chiite d'El Maliki, accusé de pratiques dictatoriales, à ses rivaux sunnites, kurdes et sadristes, prend de l'ampleur. L'appel au dialogue ne semble pas avoir beaucoup de chances de se réaliser. Après l'échec du vote de défiance, initié par 160 députés (un minimum de 163 sur les 325 que compte le parlement irakien), le chef du gouvernement a tenté des gestes d'ouverture. « Je profite de cette occasion pour renouveler mon appel à tous les partenaires politiques à s'asseoir autour d'une table pour négocier et à se montrer ouverts à des discussions sur tous les points de désaccord », a-t-il affirmé dans un communiqué. Mais, la position intransigeante de la « tripartite » (El Iraqia, Alliance kurde et le bloc sadriste), décidée à s'opposer à la « loi d'un seul homme », a ruiné les projets de normalisation et d'apaisement. « La crise ne fait que commencer », a conclu Moktada Sadr, tandis que le député d'Iraqia, Haider El Mullah, a dénoncé les « pressions exercées sur le président et certains membres du parlement », en citant « de claires pressions iraniennes ». Entre les bombes de la guerre confessionnelle et la paralysie institutionnelle et économique, l'Irak du modèle de la démocratisation à l'américaine sombre dans le « chaos constructif » à visée impériale. Y a-t-il un avenir irakien pour l'Irak unie et réconciliée avec elle-même ?