Fermée depuis plus d'une dizaine d'années, la scène politique a connu un nouveau souffle dès lendemain du discours du chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, prononcé à la nation le 15 avril 2011. Les révoltes survenues dans le Monde arabe ont incontestablement poussé les autorités algériennes à donner des gages de bonne volonté, aussi bien au niveau interne qu'externe. L'octroi d'agréments à de nouvelles formations politiques en l'espace de quelques semaines laisse pourtant les citoyens dubitatifs. Du jour au lendemain, 21 partis politiques ont vu le jour. «La profusion de partis politiques, après une fermeture de la scène depuis plus de 10 ans, demeure le paradoxe des autorités algériennes», relève Rachid Grim, politologue. Car, selon lui, «il ne faut pas croire que c'est une ouverture démocratique». «Après la chape de plomb, cette pseudo ouverture dépend d'une stratégie du pouvoir. Ces manœuvres répondent seulement pour les besoins de l'image externe», analyse-t-il. Rachid Grim pense dans ce sillage : «Puisque les élections en Algérie sont un scrutin à la proportionnelle, l'autre motivation du régime est de parasiter le paysage politique avec de nouvelles formations sans poids, dans l'optique d'empêcher les islamistes de remporter la majorité.» Toutefois, «une fois les élections passées, la plupart des partis politiques disparaîtront, car ils n'ont aucun ancrage dans la société», prévoit-il. Pour sa part, le politologue Mohamed Hennad estime que «l'octroi d'agréments à de nouveaux partis politiques peut sembler anarchique, mais en réalité c'est un calcul bien ficelé par le pouvoir». «C'est pour parasiter davantage la scène politique et pour que le régime préserve ces partis fidèles. C'est une technique pour faire durer le système. Avec cette profusion, ils véhiculent un message au citoyen et qui est : ‘Il n'y a pas d'alternative'.» Dans la foulée, Mohamed Hennad observe : «Forcément, le citoyen se repliera sur lui-même, aggravant de facto la dépolitisation de la société.» Notons au passage que la majorité des fondateurs de ces formations sont issus de partis qui existent déjà. «Reconnaître de nouveaux partis est une bonne chose en soi, mais reste la question centrale qui est celle de leur efficacité et de leur représentativité. A part un ou deux, la plupart de ces nouveaux partis ne sont pas l'aboutissement de luttes sociales et politiques. Ils sont tous le produit de dissidences et de scissions avec les formations traditionnelles dues à des divergences non pas doctrinales, mais plutôt de querelles de personnes et de luttes d'appareil. Donc, ils ne seront pas porteurs de projets et de discours nouveaux. Ils vont capter les déçus des autres partis, ce qui pourrait les affaiblir sans pour autant aller jusqu'à une reconfiguration profonde du paysage politique», affirmait, dans une déclaration à El Watan, le sociologue Nacer Djabi (voir notre édition du 28 février 2012). A titre illustratif, Abdelmadjid Menasra a claqué la porte du MSP suite à son différend avec Bouguerra Soltani. Benabdesselam du Front de la nouvelle Algérie a quitté les rangs d'El Islah, car ce mouvement est entre les mains du seul Djahid Younsi. Benbaïbèche est un ancien cadre du RND. La liste est longue. En déduction, la naissance de nouveaux partis ne traduit pas un renouveau. La réapparition d'anciens hommes politiques ne traduit pas également la volonté de soulever les aspirations du peuple.