Le FLN ne fait pas exception. Il n'est pas le seul parti sur lequel souffle le vent de la fronde. Rares sont les formations politiques qui ont pu échapper ces dernières années aux démons de la contestation. Elle a tantôt conduit à des scissions qui ont donné naissance au FAN ou au Front du changement de Menasra, tantôt à des exclusions de cadres dirigeants ou de militants comme ce fut le cas au RCD et plus récemment au RND. Ces deux derniers partis ont connu des dissidences à répétition au même titre que le FFS. Les congrès ne se tiennent presque plus dans la sérénité. On ne s'occupe pas seulement de logistique mais aussi de contenir des mécontents. La dissidence est devenue un trait de la vie politique au point que le mot « redresseurs » a remplacé celui de courants qui révèlent davantage l'existence de débats, de personnalités et une richesse d'analyses. Les affrontements dans ce cas débordent rarement dans la rue mais donnent lieu à une vie politique où les différences et les antagonismes n'excluent pas la courtoisie. « Il ne faut pas oublier que le FLN durant la guerre ou durant la période où il était parti unique avait ce qu'on appelait des sensibilités qui n'ont jamais mené à son éclatement », fait remarquer le sociologue Djabi. Sans les événements d'Octobre 1988 qui ont précipité l'adoption du multipartisme, des hommes politiques avaient défendu l'option d'une période transitoire où ces sensibilités puissent s'exprimer plus librement au sein du FLN. Aujourd'hui, on n'hésite plus à laver le linge sale en famille et à exposer sur la place publique les conflits. Il y a quelques jours, des membres de la direction du FFS s'étripaient autour de la gestion des fonds et non autour des orientations politiques. Pour le docteur Maaraf de l'université d'Alger, « cela traduit une forme de dégénérescence politique car une certaine forme de militantisme où les principes prenaient le pas sur les intérêts existe de moins en moins ». Il en voit pour preuve éclatante « cette facilité déconcertante des hommes politiques à quitter un parti pour rejoindre un autre qui n'a ni la même doctrine ni les mêmes références ». On met souvent le fait que ces mouvements de dissidence sont les effets de manipulation. « Sans un terreau favorable, réplique l'analyste, il serait difficile de pouvoir déstabiliser un parti ». La plupart des partis arrivent pourtant à contenir les dissidences. Le poids des premiers responsables qui, dans beaucoup de cas, sont les fondateurs, ont le pouvoir d'excommunier. On ne remet pas en cause impunément la parole du chef. M. Fanni, professeur à l'université d'Alger, met le doigt sur un autre phénomène. « Ce qui fragilise, explique-t-il, la plupart des dissidences, c'est le fait qu'elles se manifestent toujours à la veille des élections ». « Les directions ont alors beau jeu d'accuser les mécontents de courir seulement derrière les avantages et les placements sur les listes », ajoute-t-il. Du jour au lendemain, ils brûlent ce qu'ils ont adoré des années durant. Le revirement n'est certes pas un suicide politique. Mais il fait perdre beaucoup d'estime et de crédibilité.