Le diplomate chevronné, Lakhdar Brahimi, ne se fait guère d'illusions. Mais, le successeur de Kofi Annan affiche clairement une volonté d'indépendance de nature à favoriser un règlement pacifique et négocié de la crise syrienne. Au Caire, le refus des pressions de toutes sortes et des injonctions portant sur les préalables et la date butoir a balisé une mission qui entend privilégier le dialogue et le rapprochement des protagonistes. « Je suis l'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU, je ne veux pas qu'on me fixe des limites », a vertement répliqué Brahimi plutôt favorable à une démarche ouverte à tous les acteurs de la crise et aux puissances influentes dont l'Iran. En arrivant à Damas, considérée comme une étape clé de la mission, le médiateur international a planté le décor. Il a exprimé sa détermination d'« aller de l'avant » et de se mettre au service exclusif du peuple syrien. Mais, la sonnette d'alarme a été tirée au regard de la dégradation de la situation sécuritaire. Au moment même où il a posé pied à Damas, les combats continuent de faire rage à Damas, Alep et à Deraa, au lendemain d'une journée sanglante au cours de laquelle 132 personnes ont trouvé la mort. « La crise est dangereuse, elle s'aggrave et elle représente une menace pour le peuple syrien, pour la région et pour le monde », dira-t-il. Au cours des entretiens, l'engagement de Damas pour un « dialogue inter syrien » et une totale coopération a été réaffirmé au médiateur international assurant « qu'il allait travailler en toute indépendance en se basant sur le plan Annan et la déclaration de Genève ». Des contacts avec les « pays qui ont des intérêts et une influence sur le dossier syrien » seront encouragés et intègrent également la quadripartite (Egypte, Arabie Saoudite, Turquie, Iran), jugée non antagonique. L'appel à l'union sacrée des Syriens, lancé par Brahimi, est motivé par l'inanité de la solution imposée de l'extérieur. « La solution ne peut venir qu'à travers le peuple syrien lui-même », a-t-il encore dit, après sa rencontre, dans la capitale syrienne, avec le président syrien Bachar al-Assad. Dès son arrivée à Damas, Brahimi a tissé des contacts avec les membres du Comité de coordination pour le changement national et démocratique (CCCND), regroupant des partis nationalistes, kurdes, socialistes et communistes. Cette opposition interne revendique le lancement d'une période transitoire, conformément à l'accord de Genève, conclu en juin. « Le plan de paix Annan sera amélioré. Il y aura des idées et des mesures nouvelles, car la crise syrienne ne trouvera de solution qu'à travers un compromis arabe, régional et international », a affirmé Hassan Abdel Azim, porte-parole du CCCND. La solution à la syrienne est-elle possible ? Deux conditions majeures : la fin des ingérences des forces régionales et des puissances mondiales et le lancement d'un dialogue inter syrien crédible et consensuel.