Le syndrome des attentats plane sur Gao, ciblée en 24 heures par deux attentats suicides et théâtre d'une opération commando lancée par des groupes terroristes. Le marché a été évacué au lendemain des scènes de guérilla plongeant le commissariat, jonché de cadavres, dans un décor apocalyptique. Serait-ce l'effet du pilonnage d'un hélicoptère de l'armée française ou d'une opération kamikaze déclenchée de l'intérieur de l'immeuble ? Aucune précision n'a pu être avancée. Et, en l'absence d'un bilan d'une guerre sans témoin (une cinquantaine de journalistes évacués de Gao), les assurances du lieutenant-colonel malien, Mamadou Sanake, laissent à penser à une neutralisation des djihadistes infiltrés en ville dont les « effectifs ont été fortement réduits ». Les scènes de guérilla de Gao indiquent clairement que la « seconde phase » a commencé. Pour l'universitaire et spécialiste des questions militaires du nord du Mali, Pascal Le Pautremat, « ces attaques étaient envisagées et prévisibles. Il peut s'agir d'un coup de sonde sur les capacités de réaction des forces maliennes et françaises et en même temps d'une action psychologique ». Toute la question est là. Un mois après le début de l'intervention militaire française, la guerre asymétrique, privilégiée par les groupes terroristes, génère des capacités de résistance qui ont fait dire au ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, que la ville de Gao n'est pas « totalement sécurisée » et qu'il faudra s'attendre également à de nouvelles incursions. C'est dans un « état de vulnérabilité », relevé par l'ancien directeur de l'école de guerre française, le général Vincent Desportes, que l'armée française, forte de 4 600 éléments, se prépare à affronter une situation nouvelle. Devant l'Association des journalistes de défense, le général a expliqué que « le rapport de force n'a pas beaucoup d'importance ». Cette perception est fondée sur l'étendue du terrain qui peut se transformer en faiblesse et profiter aux djihadistes pouvant alors mener des attaques et des attentats suicides « avec un niveau de force très réduit ». Le risque d'enlisement est redouté. Outre l'impréparation de l'armée malienne et la faiblesse de la Misma, la bataille du Sahel souffre de l'absence d'un consensus et d'une vision occidentale commune, dénoncé par le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov. Tout en soulignant que la France est en train de combattre au Mali ceux qu'elle avait armés en Libye, il se dit, dans une interview accordée à la télévision russe et diffusée en Extrême-Orient, « accablé par l'incapacité de nos partenaires d'arrêter de fixer un point sur la carte et d'avoir une vue d'ensemble sur la région ».