Habitué de chanter en Algérie, le Kaiser de la chanson arabe a drainé un public record, mardi dernier à Alger, jusqu'à une heure tardive de la nuit, où l'artiste a interprété un florilège de ses meilleures chansons reprises en chœur par l'assistance. Ainsi, cette dernière, composée notamment de jeunes et de moins jeunes, a été chatouillée par « Zidini Ichkane », « Abous rouhak », « Al benaya », « Ajlissou fi al makha », « Ghali », « Ghazal », « Dhomni Ala sadrak », « Ensa », « Akhiran » et « Ahebini ». Par le timbre chaud et fin de sa voix, Kadhem Saher introduit une note de fraîcheur dans l'interprétation de sa musique. C'est un artiste en mission de communication, qui peut compter sur des admirateurs, et qui délivre, par des musiques passionnées, un véritable message de passion. Courtois et bien aimable, Kadhem Saher a bien accepté de répondre à nos questions. Parlez nous des étapes importantes de votre parcours artistique... Mon parcours artistique démarre en 1989 avec la sortie de « Ladghat al Hayya » et ne prit son essor qu'à partir de 1995 avec la chanson « Ha Habibi » qui reçut le prix de la meilleure chanson arabe pendant la première édition du festival du Caire de la chanson arabe en Egypte. J'ai réussi à vendre 30 millions d'albums et je vis depuis quelques années au Canada avec ma famille. Quelles sont les distinctions qui vous ont marqué ? J'ai reçu depuis 1995 plusieurs prix dans divers festivals dans des pays arabes et d'instances internationales dont le prix de l'Unicef pour la chanson « Dalaâ » de mon album « Qissat habibayne ». En juin 2005, après avoir participé au Festival de Fès des musiques sacrées du monde avec deux nouvelles créations, la première patriotique « Ne souffre point, Bagdad », rappelant la guerre en Irak et la seconde plus en phase avec l'esprit du festival, intitulée « J'ai vu mon Dieu avec les pupilles de mon cœur » basée sur le genre poétique arabe. La même année, j'ai été honoré à Fès au Maroc après le virtuose syrien Sabah Fakhri. Puis, j'ai reçu une lettre de congratulations et de remerciements de la part du prince Charles de Galles et de son épouse Camilla Parker Bowles à l'issue d'un concert animé à Londres dont les gains ont été versés en faveur des enfants orphelins en Irak et en Palestine. Vous êtes souvent invité en Algérie et même lors du festival du film arabe à Oran. Vous êtes donc très coté chez le public algérien... J'ai, effet, participé à plusieurs manifestations en Algérie. C'est un énorme honneur pour moi de chanter pour l'Algérie. Je considère l'Algérie comme étant un pays frère. Un très beau pays. Des gens agréables. J'adore l'échange qui s'opère avec le public algérien. C'est extraordinaire. C'est une bonne expérience pour moi car cela me permet de mieux connaître la musique algérienne, accroître mon savoir, mes connaissances et tisser des liens avec d'autres artistes. On a appris que lors d'un concert que vous avez animé à Timgad, vous avez tenu à chanter quelques tubes de Warda El Djazaïria. Pourquoi cette démarche ? A vrai dire, j'ai voulu rendre un hommage posthume à la diva de la chanson arabe. Je voulais honorer la mémoire de la défunte. Je la considère comme la reine du « tarab ». Son répertoire riche et varié alterne au gré de l'actualité, mélodies d'amour et chants patriotiques. Pensez-vous qu'avec l'organisation des festivals vous participez à la promotion et au développement de la musique ? Incontestablement, c'est d'ailleurs le but essentiel de notre approche car le développement ne se fait que par la formation et la communication du savoir par des professionnels qualifiés. Aujourd'hui, on assiste à des expériences plus ou moins heureuses proposées par des interprètes qui tentent d'apporter leur touche à l'édifice et le public reste le seul juge. Nostalgie, ce sentiment continuera-t-il à être votre crédo dans l'avenir ? On dit que le classique est un genre indémodable. En toute modestie, j'interprète des morceaux qui sont très savants et émouvants de par le texte et la musique. Que pensez-vous des musiciens de la nouvelle génération ? A chacun son époque. Aujourd'hui comme hier, il y a de bons et de moins bons musiciens. Seulement, les jeunes d'aujourd'hui font de la peine car ils sont mal encadrés, c'est-à-dire qu'il y a un manque d'infrastructure spécialisée pour l'enseignement des différentes disciplines de la musique. Cela incombe à une mauvaise gestion et organisation. C'est quoi le plus important pour un artiste comme vous ? Mon objectif majeur est de réussir une bonne musique. La preuve, dans tous mes albums, je me donne à fond en incorporant tout mon savoir et mon expérience musicale. Quelles sont, selon vous, les perspectives pour un jeune chanteur ? Pour ma part, l'idéal est d'assurer une bonne formation pour un artiste en général et un chanteur en particulier, lui permettant ainsi d'évoluer judicieusement. Il faut lui assurer une série de formations et d'ateliers. Comment définiriez-vous votre travail ? Un travail riche et complexe à la fois. Il convient de signaler que c'est un travail très enrichissant. Pour moi, la musique constitue une passion. J'estime qu'il est indispensable d'exercer un métier par vocation. Que vous apporte la musique ? Lorsque j'ai un rapport avec la musique que ce soit celle des autres ou la mienne, j'éprouve à la fois une si forte émotion et un tel sentiment de plénitude que je n'y trouve aucun équivalent, excepté dans l'amour ou encore dans la conquête des cimes. Au plus profond de votre motivation, pour qui chantez-vous ? Je pense qu'on chante d'abord parce qu'on en a envie, donc pour soi. Mais on comprend vite que si l'on veut être écouté, il faut aussi tenir compte de ce que pourra ressentir le public ou encore l'auditeur. Y a-t-il des avantages quand on est chanteur ? Je pense que c'est en fonction du degré de notoriété. Et des inconvénients ? A mon avis, l'inconvénient c'est qu'on évolue dans un secteur d'activité en pleine mutation, il est de plus en plus difficile de vivre de la musique. Avez-vous éprouvé des difficultés particulières durant votre carrière ? Non, Dieu merci, je n'ai pas connu de déboires. Auriez-vous un conseil à donner à un jeune artiste ? Pour moi, il existe trois facteurs de réussite : travail, rigueur et modestie. Il est essentiel d'exercer son métier avec vocation et non pas par appât du gain facile car le succès sera éphémère. Il est essentiel de se faire évaluer par un public inconnu. Pourquoi Khadem Saher s'intéresse-t-il à la poésie ? La poésie jouit et profite de son rôle indispensable au sein des sociétés depuis tout le temps. Cet art permet de livrer un message fort et puissant. Cette idée de pouvoir retenir l'infini dans la forme même d'un poème, s'avère un défi divin. Question subsidiaire, comment employez-vous votre temps libre ? J'emploie mon temps d'une manière utile. Si le temps est si précieux et si important, il l'est d'autant plus durant les vacances. J'emploie mon temps à parfaire ma musique.