Fait marquant : pour la première fois, la presse a été autorisée à assister du début jusqu'à la clôture de cette rencontre qui se distingue également par le fait qu'elle soit élargie à des associations à caractère économique et à des experts en économie en plus des partenaires habituels à savoir le patronat et la Centrale syndicale.Après échange des points de vue, le débat lancé sur les perspectives de l'économie nationale, déroulé en six heures de temps non-stop, a été sanctionné par la mise en place de cinq groupes de travail tripartite, lesquels devront rendre leurs conclusions d'ici trois mois au maximum, a annoncé le Premier ministre, Abdelmalek Sellal. Le premier groupe qui sera chapeauté par le ministre du Développement industriel et la Promotion de l'investissement est chargé d'élaborer le pacte économique et social de croissance. Le ministre des Finances a été instruit de mener les travaux du deuxième groupe, lequel est chargé de proposer les modalités de contribution du Fonds national d'investissement (FNI) au financement de l'investissement national public et privé. Le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme devra, quant à lui, présider le groupe chargé de proposer les modalités facilitant l'intervention des entreprises nationales du BTPH dans la réalisation du programme national d'équipement. Le quatrième groupe de travail sera chapeauté par le ministre du Commerce devra faire des propositions pour l'encouragement de la production nationale, dont le crédit à la consommation pour les produits locaux. Enfin, le dernier groupe de travail, à sa tête le directeur de cabinet auprès du Premier ministère, est chargé de l'encadrement des actes de gestion. LES SECTEURS PUBLIC ET PRIVE EXORTES A MENER ENSEMBLE LA BATAILLE DE L'INDUSTRIALISATION Pour le chef de l'exécutif, il est impératif que les partenaires sociaux créent des synergies en assurant un dialogue basé sur la dialectique et la transparence. Le privé comme le public sans distinction sont, aujourd'hui plus que jamais, appelés, souligne M. Sellal, à mener conjointement la bataille de l'industrialisation qui « nous permettra de disposer d'une économie diversifiée qui répond à la demande intérieure tout en s'insérant, à travers les exportations, dans les échanges internationaux ». Pour M. Sellal, il est temps de parler d'entreprise nationale. Il va sans dire que « l'entreprise privée, ou à capitaux privés, n'est pas un mal nécessaire, mais un bien indispensable ». Pour souligner l'importance accordée aux entreprises privées, le Premier ministre a fait savoir qu'en 2012, la part de ce secteur représente 52% du total de l'ensemble des crédits octroyés à l'économie. Cette tendance s'est poursuivie en 2013. Evoquant le secteur industriel public, M. Sellal a souligné que sa contribution au Pib national n'est pas négligeable. Pour les 8 premiers mois de l'année 2013, ce secteur a enregistré une croissance de 10,8% de sa valeur ajoutée comparée à 2012. Les entreprises publiques doivent, cependant, pour améliorer leurs performances, envisager « des partenariats avec des entreprises leaders dans leur domaine. L'Etat se doit de les aider, en veillant à élargir leur marge de manœuvre et leur autonomie avec la sécurisation des cadres ». Cela étant, les deux secteurs sont appelés à « améliorer la compétitivité entre les entreprises et la création de la richesse », comme ils doivent développer leur outil de production. M. Sellal a déploré le fait que seulement 10% des entreprises sont connectées à Internet. L'Etat a aussi un rôle dans cette nouvelle architecture économique. « La régulation, l'arbitrage entre les acteurs économiques et sociaux, les orientations stratégiques ». L'essentiel pour M. Sellal « c'est d'aller ensemble vers la croissance », soulignant que l'industrialisation « n'est pas une utopie ». La participation de la diaspora est également prônée mais « conditionnée ». Elle est même recommandée pour l'amélioration du niveau de l'enseignement universitaire. A ce sujet, M. Sellal a appelé à valoriser les sciences techniques, principalement les maths. « Seulement 8% de l'enseignement se font dans les maths alors que la moyenne devra être de 20% » a-t-il souligné. L'industrie doit contribuer A au moins 10% du Pib Pour M. Sellal, le potentiel industriel doit être valorisé. Il devra au moins contribuer à 10% au produit intérieur brut (Pib). Le Premier ministre a fait observer que l'industrie devra être « le moteur essentiel d'une croissance saine, moins dépendante des hydrocarbures ». Il est question, selon lui, de mettre en place une politique de substitution des produits locaux aux produits importés. « C'est nécessaire certes mais c'est insuffisant », a-t-il dit avant d'ajouter que « pour relever le niveau de croissance économique, réduire nos importations et nous insérer dans l'économie mondiale, j'invite les opérateurs économiques à améliorer leur production quantitativement et qualitativement ». Il est aujourd'hui recommandé, poursuit-il, de « réussir la transition d'une économie dominée par la dépense publique à une économie diversifiée créatrice de richesse et d'emplois durables ». Pour ce faire, le Premier ministre soulignera qu'il est impératif de rompre avec certains choix, tels que la focalisation excessive sur le marché local, charger les entreprises publiques de l'essentiel de l'investissement industriel, maintenir ces entreprises sous l'emprise tatillonne des administrations. Il soulignera que le gouvernement « intensifiera ses efforts pour combattre la bureaucratie et les passe-droits ». M. Sellal a fait observer que « derrière tout acte bureaucratique, il y a une recherche de corruption ». Vers la création de champions économiques La nouvelle politique industrielle vise également l'émergence de champions économiques dans les filières et activités qui disposent des atouts en vue de se frayer un chemin dans les marchés extérieurs, et par conséquent booster les exportations. Tout en citant deux filières à promouvoir, en guise d'exemple, à savoir la pétrochimie et la sous-traitance industrielle, le Premier ministre a fait savoir que les entreprises qui s'orientent vers les exportations « peuvent bénéficier de soutiens ». Pas de remise en cause du Crédoc et les importateurs de véhicules contraints à investir « L'Etat ne gérera plus l'économie par des injonctions administratives mais conformément à des règles économiques. Nous n'interdirons rien aux Algériens sauf ce qui est interdit par la loi mais nous contrôlons sévèrement nos importations », a souligné le Premier ministre. Evoquant « l'économie de marché », M. Sellal s'est montré ferme : « nous n'irons jamais à l'ultra libéralisme ». En réponse à la préoccupation du patronat, le chef de l'exécutif a été catégorique en soulignant qu'il n'est nullement question d'annuler le crédit documentaire. « Le Crédoc ne sera jamais remis en cause mais nous l'allégerons et nous veillerons à mieux contrôler les importations et mettre un terme aux tricheurs », a avancé M. Sellal. S'adressant au SG de la centrale syndicale qui a formulé la demande de réintégration de l'autorisation d'importation, M. Sellal a souligné que le problème du superflu ne peut être « réglé par l'interdit mais d'une manière intelligente en mettant des normes et une législation qui protègent la production nationale. Nous ne pouvons pas bloquer l'importation mais faire attention ». Il soulignera, toutefois, qu'il n'est pas judicieux « d'importer des produits bas de gamme ou des produits que nous fabriquons localement, comme le jus par exemple ». M. Sellal a expliqué que certes « les importations ont grimpé de manière très importante sans être dangereuses, mais il faut savoir aussi que cet état de fait est dû à cette relance de la production. Une grande partie des importations représente des imputs ». Concernant l'importation des véhicules, M. Sellal a souligné que seuls les concessionnaires agréés y sont autorisés. « Ils doivent être responsables de la qualité comme ils doivent investir dans le domaine industriel, semi-industriel ou dans les services. C'est la seule manière de mettre un terme à l'informel », a-t-il souligné. le principe de 51/49 irréversible Concernant le principe d'investissement 51/49, sa révision n'est pas à l'ordre du jour. « Le 51/49 a protégé notre économie et continuera à la protéger », a-t-il expliqué tout en citant l'exemple du complexe d'El Hadjar. Selon M. Sellal, n'était le plan de sauvetage entrepris par le gouvernement en reprenant les parts majoritaires, le complexe aurait été voué à la fermeture. « Rien n'a été fait pour moderniser ce complexe. Nous avons repris la majorité des parts sans payer un dinar mais nous nous sommes engagés à lancer un plan d'investissement pour remettre sur les rails ce complexe », a-t-il rappelé avant d'informer que les fourneaux à l'arrêt vont être rétablis en novembre prochain. Dans ce même cadre, le Premier ministre a annoncé la création d'un complexé de textiles en partenariat avec un opérateur turc à Relizane avec 18 entreprises dont 50% de la production est destinée à l'exportation, lequel devra créer 25.000 postes d'emploi. Evoquant le foncier industriel, M. Sellal a fait savoir que 30 à 35% du foncier industriel n'est pas valorisé. Il informera par ailleurs que le statut de l'ANDI sera révisé. Une commission pour proposer des mesures de dépénalisation de l'acte de gestion Pour traiter cette question de dépénalisation de l'acte de gestion, M. Sellal a annoncé la mise place, dans un mois ou deux au plus tard, d'une commission. Celle-ci devra formuler des propositions, a-t-il dit, avant d'ajouter : « notre rôle est de protéger les cadres et la dépénalisation de l'acte de gestion n'est pas la solution. Il s'agit de l'argent public. Nous sommes responsables et nous devons contrôler sa gestion. Nous pouvons tolérer l'erreur mais pas la préméditation ». Pour ce qui est du départ à la retraite des cadres, M. Sellal a affirmé qu'en peut les retenir dans leur poste en cas de nécessité, néanmoins il « faut laisser la place aux jeunes ».