Si les revendications exprimées par les médecins sont essentiellement d'ordre socioprofessionnel (salaires et primes), les conditions d'hygiène et surtout l'afflux des patientes, qui entraîne une charge de travail, sont également dénoncés. en raison sans doute de la réputation de leurs médecins et autre personnel, les deux maternités de la wilaya de Constantine, celle de Sidi Mabrouk et celle du CHU, accueillent depuis des années des milliers de femmes par an. Débordés, fatigués parfois même découragés, les médecins résidents de la clinique Sidi Mabrouk continuent quand même à prendre en charge près de 12.000 patientes par an ! Un record. Une résidente en gynécologie nous explique les raisons qui les ont conduits, elle et ses collègues, à déclencher une grève : « Certes, nous avons revendiqué les primes de garde et de contagion, mais au fond, les médecins sont tous fatigués par les conditions de travail. L'équipe de garde s'occupe, à elle seule, d'une trentaine d'accouchements par nuit, parfois la moitié de ces accouchements se font par césarienne. Nous savons tous que la plupart de ces femmes sont issues des autres wilayas de l'Est, et beaucoup d'entre elles sont des malades lourds, c'est-à-dire qu'elles arrivent dans beaucoup de cas avec des saignements ou des complications graves. » Pour un autre médecin, la solution existe et elle est radicale.« Il suffit d'affecter dans les hôpitaux d'Oum El Bouaghi, Aïn M'lila, Oued Zénati ou Aïn Fakroun, du personnel qualifié, les médecins résidents sont nombreux, ce qui n'est pas le cas pour les maîtres assistants et les professeurs. Avec le peu de moyens dont nous disposons et le nombre important de patientes que nous recevons, nous arrivons tout de même à éviter les accidents et les erreurs médicales. Nous subissons également une pression énorme car les familles des parturientes sont parfois agressives, à la moindre occasion, ce sont les insultes et parfois même les agressions physiques », nous explique-t-il tout en ajoutant que beaucoup de ses confrères se retrouvent devant les tribunaux. La direction de la clinique, qui a accepté de signer un engagement en faveur des grévistes pour régler le problème des primes, est, elle aussi, confrontée au problème de la charge. Sur ce point, elle partage l'avis des médecins. Selon le directeur, M. Brania, et le chef de service de gynécologie, le professeur Selahi, la maternité, avec ces bâtiments qui datent de l'époque coloniale, n'est pas en mesure d'accueillir tout ce beau monde. Conçue pour seulement 64 lits, la moyenne quotidienne est de 250 lits qui sont occupés par les patientes de la clinique. 12.000 accouchements sont pratiqués chaque année, soit un taux d'occupation de 235% ! Des chiffres qui préoccupent le directeur qui a bien voulu nous recevoir : « Que voulez-vous qu'on fasse, quand une femme de nationalité algérienne issue d'Oum El Bouaghi ou de Mila vient chez nous, on ne peut pas la refuser. Cet afflux ininterrompu de patientes pèse aussi bien sur les médecins que sur l'administration. Pour vous donner une idée, nous avons un matériel de dernière génération, mais compte tenu du nombre élevé de patientes, il y a forcément une usure des machines. » La direction a engagé toutefois des travaux de réhabilitation de la clinique, qui ont commencé au mois de juillet dernier — tout en assurant l'activité — et qui devraient s'achever avant la fin de l'année. Toute la structure sera réhabilitée. Le directeur nous fera savoir qu'une extension de la maternité est à l'étude, même si un tel projet reste difficile à réaliser en raison du manque d'effectif.