La perception différenciée de la menace iranienne a provoqué des fissures dans le Conseil de coopération du Golfe (CCG) perdant en cohésion et en concertation. Lors du cadre de dialogue de Manama, arbitrant un forum annuel sur la sécurité régionale entre des responsables occidentaux et les pays de la région, la sortie tonitruante du sultanat d'Oman a confirmé le malaise ambiant dans des proportions jusque-là insoupçonnées. Le niet omanais à la proposition saoudienne, appelant à une union du Golfe et devant être présentée à la rencontre prévue, mardi et mercredi prochains, au Koweït, traduit la densité des divergences entre les partisans et les adversaires irréductibles au rapprochement avec le puissant voisin. « Nous sommes contre l'union des pays du CCG », a martelé le ministre des Affaires étrangères, Youssef Ben Alaoui. Pleinement convaincu qu'il sera toutefois difficile de l'en empêcher, il évoque, dans ce cas d'espèce, le retrait pur et simple. A l'avant-garde du processus de négociation dont il a accueilli secrètement le round final de l'accord du 24 novembre sur le programme nucléaire, le Sultanat d'Oman ne partage pas l'approche unitaire saoudienne, conçue comme « une nécessité politique, économique, sécuritaire et stratégique pressante » et fondée sur la prévalence de « l'intérieur général sur l'intérêt particulier ». Les 5-1 du CCG : une réalité tangible ? A Manama, le secrétaire d'Etat américain à la Défense, Chuck Hagel, avait fort à faire pour rassurer et calmer la fronde des alliés régionaux inquiets des retombées de l'accord sur le nucléaire iranien « mal interprété ». Il s'agit en fait d'allier la percée diplomatique avec la puissance militaire qui reste le gage principal de l'engagement des Etats-Unis dans la région. La présence militaire, fera-t-il valoir, restera forte d'une armada de 35.000 hommes maintenus « dans et autour du Golfe ». Soit 10.000 soldats armés de tanks et d'hélicoptères Apache, environ 40 navires et un porte-avions, des systèmes de défense de missiles, des radars avancés, des drones de surveillance et des avions militaires « les plus modernes » dont des F-22 qui peuvent être opérationnels immédiatement. « Si on y ajoute nos munitions uniques, aucun objectif n'est hors de notre portée », a précisé le chef du Pentagone. Le message américain, levant les incertitudes sur le « retrait américain », conforte « le rôle central du partenariat de défense » entre les Etats-Unis et le royaume saoudien, au cœur des entretiens, à Manama, entre Chuck Hagel et le vice-ministre saoudien de la Défense, le prince Salmane ben Sultan Ben Abdel Aziz. A partir de demain, le secrétaire américain à la Défense entamera une visite en Arabie saoudite et au Qatar pour confirmer la solidité des relations stratégiques et réaffirmer la volonté de Washington de rester « pleinement engagée pour la sécurité de nos alliés et nos partenaires dans la région ».