« Si les principaux sanctuaires djihadistes dans le nord du Mali ont été détruits, la menace persiste. Surtout que des activistes et des armes sont toujours acheminés depuis des bases arrière situées au sud de la Libye », avance le ministre français de la Défense dans une conférence au Center for Strategic and International Studies (CSIS), un think tank US, avant de rencontrer son homologue américain, Chuck Hagel, vendredi à Washington. Face à la vulnérabilité des Etats, de la Mauritanie à la corne de l'Afrique, devant les menaces (djihadisme, criminalités diverses), le ministre français, qui estime que « ces actions terroristes peuvent remettre en cause la sécurité » de l'Occident, prône une approche régionalisée. « La Libye,qui peine à se défaire de ses milices et à sécuriser ses frontières, représente un défi de premier rang », dit-il. Et de préciser : « tant que cette situation perdure, nous serons obligés d'aider les pays voisins à se prémunir du chaos libyen, singulièrement au Sud, principalement le Niger et le Tchad ». « Nous engageons ce processus qui couvrira l'ensemble de la zone avec des bases et nous comptons déployer à peu près 3.000 militaires permanents avec des unités capables de sauter d'un point d'appui à l'autre, un peu comme le font déjà les forces américaines », dit-il. Autrement dit, pour mieux surveiller et, au besoin, lancer des opérations, la France, qui n'exclut pas d'insérer des détachements dans les unités africaines, disposera d'un ensemble de points d'appui disséminés sur tout le nord de la bande sahélienne. Notamment à Dakar, Ndjamena, Libreville, Djibouti, Douala, Abidjan, Atar (Mauritanie) Gao et Tessalit (Mali), Ouagadougou (Burkina Faso) et Niamey (le tout nouveau pôle dévolu aux drones et au renseignement au Niger). A ces bases avancées, il faut ajouter Faya-Largeau dans le nord du Tchad, près de la frontière libyenne, et l'ouverture d'une école de formation des forces spéciales à Gao. Parallèlement à ce déploiement, la France, qui a déjà signé deux accords de défense en décembre avec le Tchad et le Niger en attendant un autre avec le Mali dans les prochains jours, se tourne vers les Etats-Unis. « Pour approfondir nos échanges et notre coopération de renseignement, comparer nos analyses stratégiques et consolider la capacité de nos forces – en particulier de nos forces spéciales – à agir ensemble », affirme Le Drian, ajoutant que le partenariat entre son pays et les Etats-Unis est « indispensable » en Afrique. « La coopération franco-américaine de défense n'a jamais atteint une telle intensité », dit-il. Il est vrai que la France bénéficie en Centrafrique et au Mali d'un soutien américain en matière de transport aérien, de ravitaillement en vol et de renseignement, notamment grâce aux drones américains qui opèrent dans la région et qu'elle redoute comme les Américains le danger d'une recomposition des groupes terroristes armés.