Lancées depuis seulement trois ans sur les fréquences des satellites, les chaînes de télévision privées algériennes se cherchent encore. Quel bilan peut-on dresser de ces nouvelles chaînes lorsqu'on sait que les textes de loi sur l'audiovisuel viennent tout juste d'être promulgués ? Quel est leur impact ? Ont-elles réussi à séduire le public algérien ou font-elles seulement de la figuration dans un paysage médiatique dominé depuis des années par la concurrence des chaînes arabes et françaises ? L'association Sahafat El Ghad (la presse de demain) a organisé, jeudi dernier, à l'Université islamique Emir-Abdelkader de Constantine, une journée d'étude sur le thème de « l'expérience des chaînes de télévision privées algériennes ». Une rencontre à laquelle ont participé des journalistes, des enseignants du département de communication, des étudiants et des patrons de média. Les invités, qui pour la plupart connaissent le domaine de l'audiovisuel, ont abordé le sujet sans aucun tabou et passé au crible la récente expérience algérienne. L'animateur Slimane Bakhlili, actuellement à Echourouk TV, dira que l'application de la loi organique sur l'audiovisuel est plus que nécessaire pour donner un cadre légal, un véritable statut qui garantira plus de transparence de la part de ces chaînes. Il regrettera, par ailleurs, que « la plupart des animateurs de ces chaînes imitent ou s'inspirent des chaînes étrangères, orientales en particulier, notamment en ce qui concerne la langue et la prononciation, ce qui pour moi est une véritable aberration, comme si nous n'avions pas une identité propre à nous ». Pour Khelili, c'est la crise économique mondiale de 2008 qui a joué un grand rôle dans l'avènement des chaînes privées. « Les propriétaires du satellite Nilsat ont perdu beaucoup d'argent après 2008, ce qui les a contraint à ouvrir leurs fréquences à n'importe qui. Aujourd'hui, avec une simple carte de crédit, n'importe qui peut lancer une chaîne », explique-t-il. Un avis que partage par Mohamed Mouloudi, pdg de la chaîne de télévision pour enfants Djurdjura, qui déclare : « C'est devenu très facile d'ouvrir d'une chaîne de télévision. Moi-même j'ai eu mon agrément à partir de Londres en une journée. Il suffit juste de payer les droits, et pas besoin de studios ou de matériel sophistiqué. Je connais des personnes qui ont ouvert des chaînes à partir de chez elles. Maintenant, le problème qui se pose pour nous est celui du statut. Nous avons longtemps attendu cette loi sur l'audiovisuel. L'autre souci, c'est d'acheter des programmes, tout en évitant le modèle trop oriental. Je fais de mon mieux pour inclure des programmes proches de notre culture, de notre langue et de nos traditions. » Enfin, Ali Djerri, ex-directeur de la publication d'El Khabar, versé depuis dans le domaine de l'audiovisuel, estime qu'il faut laisser du temps à ces nouvelles chaînes. « Les dérapages relevés montrent à quel point ce secteur manque de professionnalisme, je pense, toutefois, que nous allons avoir une meilleure qualité des programmes dans les années à venir. Le problème actuel est que rares sont les personnes parmi les journalistes et les techniciens qui ont suivie une formation dans le domaine », conclut-il.