Paradoxe des paradoxes : les Européens auront droit à un Parlement original. Sur les 751 députés qu'ils ont élus dimanche dernier, 200, dont 100 de l'extrême-droite, ne croient pas en l'Europe et donc à leur utilité. Certains, comme Nigel Farage, un antieuropéen britannique depuis 1999, ne cache pas qu'il milite pour l'abolition de son métier. Les partis d'extrême-droite hostiles à la construction européenne ont vu leurs résultats exploser. Cette poussée n'a épargné aucun pays. En France où le parti socialiste au pouvoir et l'UMP ont été laminés par le Front national qui a glané 25% des suffrages exprimés, le degré de défiance est significatif. Selon l'Eurobaromètre paru à l'automne 2013, seuls 32% des Français ont « confiance » en la Commission européenne contre quand 45% à l'automne 2008. Les raisons ? Elles sont multiples. Parmi celles-ci, la dimension économique. Tous les continents enregistrent une reprise de la croissance. Sauf la zone euro qui enregistre, en sus d'un PIB qui chute, un taux de chômage en hausse. Mais le Vieux continent ne doit pas se soucier pour ses jours. Du moins pour l'immédiat. Les europhobes et les eurosceptiques, qui seront assez nombreux pour donner de la voix à leurs discours et sonner comme des coups de tonnerre, ne seront pas dans la possibilité de bloquer les travaux de l'hémicycle. « Mais il y aura des conséquences sur les scènes politiques nationales et la façon dont les dirigeants nationaux agiront au sein de l'UE », estime Jan Techau, directeur du groupe de réflexion Carnegie Europe. Le Parti populaire européen arrive largement en tête, avec 212 sièges, loin devant les socialistes (185) les libéraux (71) et les Verts (55). Ces quatre groupes pro-européens, qui ont tous laissé des plumes, avaient 612 dans le Parlement sortant. Fait pas anodin : pays de l'Europe centrale et orientale, largement enthousiastes vis à vis de l'UE, ont boudé massivement ces élections (22,7%). Une bataille se profile déjà pour la présidence de la Commission européenne. Le candidat du PPE, Jean-Claude Juncker, l'a « revendiqué ». Le président de la Commission, José Manuel Barroso, a appelé, hier, les forces européennes à se « rassembler ». « Une majorité solide est possible », dit-il.