Des champs de vignoble s'étendent, en effet, à perte de vue transformant les pleines et les collines en un tapis verdoyant formant un paysage féerique. Plus de 80% du potentiel viticole est localisé au niveau de trois communes : Ouezra, Si- Mahdjoub et El-Omaria. Des localités où l'on cultive le raisin depuis des générations. Mais, selon les agriculteurs, le rendement, ces dernières années, est nettement en deçà des potentialités existantes. Mais, le délaissement partiel du vignoble par les viticulteurs a induit la dépréciation de la qualité des raisins produits. Nombre de contraintes, tel le déficit en moyens matériels (tracteurs, chenilles...) qui sont indispensables, puisque 95% du potentiel viticole est localisé en coteaux à pentes très accentuées, annihilent les efforts des aviculteurs. Ceci sans parler des exploitations abandonnées pour cause de conflits entre familles héritières qui, souvent, n'arrivent pas à trouver une solution et ce, même en recourant à la justice. BENCHICAO, LA VALLÉE DE «AHMAR BOUAÂMAR» A Benchicao (daïra de Ouezra) (1240 m d'altitude), la viticulture est une affaire de familles, c'est un métier ancestral qui se transmet de père en fils. Dans cette région, la vigne se cultive avec passion. «Ahmar Bouaâmar» est une variété très prisée de raisins. Elle a aussi cette particularité d'être arrachée tardivement, sa cueillette pouvant s'étendre jusqu'à la fin du mois d'octobre. Ce produit du terroir, qui se distingue par sa couleur rougeâtre et sa qualité supérieure, se vend à plus de 150 DA le kilogramme. «Ahmar Bouaâmar et Mokrani (Valencien) ont une spécificité. Ces deux qualités de raisins peuvent être cultivées dans d'autres régions du pays, mais elles ne peuvent avoir une meilleure qualité que celle des coteaux de Médéa et plus particulièrement dans la daïra de Ouezra», nous dit Lounès Bachir, un ingénieur agronome à la DSA. Selon lui, un atelier sur le vignoble a été organisé récemment à Médéa et lors duquel des propositions ont été faites par les spécialistes pour au moins préserver les 7200 ha de vigne qui sont exploités dans la wilaya de Médéa dont l'âge dépasse vingt ans pour une grande partie de ces plants. Selon le spécialiste, il est primordial de procéder à l'amélioration du potentiel du vignoble par la plantation de nouvelles vignes et ce, à l'effet d'augmenter la capacité de production et de pouvoir procéder à l'arrachage des vieilles vignes. Pour l'ingénieur, cette opération ne peut être réalisée qu'avec l'appui de l'Etat car, selon les prévisions, la plantation d'un hectare de vigne coûte plus de 70 millions de centimes. Un montant au-dessus des moyens des viticulteurs dont le grand souci présentement est de combattre l'oïdium et le mildiou, des maladies cryptogamiques qui déprécient rapidement le raisin et stoppent son développement. Sur les hauteurs de Benchicao, Hamadi Hocine, un ancien viticulteur ayant bénéficié de plusieurs hectares de terre lors du lancement de la révolution agraire par le défunt président Houari Boumediene, est déçu par la mauvaise récolte en raison des attaques de l'oïdium et du mildiou. Il a investi toutes ses économies dans la culture de trois hectares de vigne «Ahmar Bouaâmar» et compte brader sa récolte au marché local se contentant du tiers de son prix de vente réel. Accompagné de ses deux chiens qui ne le quittent jamais, le vieil homme raconte, et se souvient lorsque l'Etat lui a envoyé un camion plein de matériel composé de piquets et de fil de fer pour pouvoir planter sa vigne. Il nous montre un piquet : «vous voyez ? Il date de la création de cette exploitation en 1972», dit Hamadi, approuvé par son fils Kadour. Le potentiel viticole dans la wilaya de Médéa est détenu en majorité par des EAC (Exploitations agricoles collectives). A l'EAC de Si Antar N°1, dans la commune de Ouezra, un groupe d'agriculteurs exploite plusieurs hectares de raisin de table et de pommiers. Hocine est le gérant de cette exploitation. Pendant toute la matinée il s'échinait, avec ses collègues, à réparer un tracteur qui date des années 70 et qui est pourtant complètement amorti. Cet engin semble être le tracas du gérant de l'EAC. Fort heureusement, les 4 hectares de vignoble «Ahmar Bouaâmar» n'ont pas été touchés par l'oïdium ou le mildiou. Toute la récolte est déjà vendue à un commerçant qui n'a pas encore commencé l'opération de récolte. L'OÏDIUM ET LE MILDIOU, CES ENNEMIS REDOUTABLES Rares sont les récoltes qui sont épargnées par l'oïdium et le mildiou. Les viticulteurs sont découragés par ce fléau qui se propage d'une manière très rapide et apparaît lorsque la vigne commence à se développer. Les multiples produits spécifiques de traitement de la vigne, disponibles sur le marché, s'avèrent inefficaces pour combattre ces deux maladies. Seuls le soufre et le cuivre peuvent éradiquer ces maladies des vignes. Mais ce traitement (soufre) est non seulement peu disponible sur le marché, mais sa vente est réglementée, selon Mme Kherroubi, chef du service production au niveau de la DSA. Seuls le viticulteur ayant la carte d'exploitant peut acquérir ce traitement, le reste des vendangeurs sont contraints d'utiliser le soufre à base d'eau qui est sans aucune efficacité. Face à ce dilemme, les viticulteurs traitent la vigne quatre à cinq fois pour éviter les attaques de l'oïdium et le mildiou qui restent les premiers ennemis de la viticulture. Malgré la menace continuelle de ces maladies, la récolte de cette année a été encore meilleure, passant de 321 400 quintaux en 2009 à 432 980 qx en 2010. Ce résultat est le fruit des efforts des viticulteurs qui veillent sur le traitement de la vigne à chaque fois qu'il est nécessaire.