La question des condamnés à mort et leur rôle dans la guerre de Libération nationale sont plus que jamais d'actualité, notamment à l'occasion de leur journée nationale, commémorée le 17 juin de chaque année. Ali Haroun, avocat, a regretté « le manque d'intérêt de l'Etat à ce sujet à la fois sensible et important ». Lors d'une conférence organisée, hier, au forum d'El Moudjahid, il a donné quelques éléments d'information sur la situation des condamnés à mort de la Fédération du FLN de France. « J'étais au courant de ce qui se passait dans les 83 prisons et 4 camps d'internement. Nous avions des informations importantes sur les condamnés à mort. Les archives constituées sur ce dossier ont disparu en 1962. Nous parlons donc de mémoire », a-t-il regretté. En France, 114 militants de la Fédération du FLN étaient condamnés à mort sur une communauté de 250.000 Algériens vivant dans l'Hexagone. En Algérie, il y a eu 1.000 condamnations à mort au sein d'une population de 9 millions d'habitants. « La proportion est importante. Les Algériens se trouvant en France étaient plus réprimés. Ils étaient jeunes (entre 20 et 30 ans), exilés, partis en France à la recherche d'un travail, mais ils avaient une grande force de par leur adhésion volontaire au combat contre le colonisateur », a-t-il indiqué. Ali Haroun rappellera que les avocats avaient la possibilité d'accéder aux prisons et aux couloirs de la mort, ce qui a permis de leur communiquer les instructions de la Fédération. « Ils savaient qu'ils allaient mourir, mais leur détermination était intacte », a-t-il souligné. Il racontera avec beaucoup d'émotion l'histoire d'Abderrahmane Khelifi, condamné à mort et exécuté alors qu'il n'avait que 17 ans. « Le tribunal militaire français a contesté sa date de naissance et lui a donné plus que son âge. Habituellement, la direction de la prison informe l'avocat quelques heures avant l'application de la peine de mort. Pour Khelifi, il y a eu une erreur dans la mesure où son avocat a été informé 48 heures à l'avance. Nous avons eu donc le temps d'informer le monde entier. L'intervention de l'Onu, des chefs d'Etat, du pape et autres personnalités n'a pas dissuadé les autorités coloniales de commettre un autre acte grave, à savoir l'exécution d'un mineur ». L'avocat est revenu sur le « courage » des condamnés à mort qui « disaient aux juges français ne pas reconnaître leur justice car ils sont des soldats et non pas des fauteurs de troubles, et qu'ils militaient pour l'indépendance de leur pays ». Ces propos tenus au moment où les autorités françaises refusaient de « parler de révolution en Algérie ». En 1999, le parlement français a parlé de révolution concernant le cas de l'Algérie. « 50 ans après, l'Histoire a donné raison à ces braves militants, car ce sont les Français eux-mêmes qui reconnaissent cette révolution. Ces gens qui se trouvaient en France ont donné plus que ceux de l'Algérie à la Révolution, car ils se trouvaient chez l'ennemi. Ils ont apporté des choses énormes qu'on n'a, malheureusement, pas reconnues après l'indépendance », a-t-il regretté. « Il y a une injustice historique qu'il faut corriger », a-t-il insisté.