Boudjemaâ Haichour, ancien ministre de la Poste et des Technologies de l'Information et de la Communication, cadre au FLN, profite du mois sacré pour se consacrer davantage à ses proses. Il s'adonne aussi à la lecture pendant cette période qui lui procure sérénité et quiétude. Par le jeûne, « on arrive à réguler à la fois le mental et le physique », dira-t-il. Que signifie pour vous le Ramadhan ? Le Ramadhan, c'est le mois de la plénitude et de la piété. A travers le jeûne, on essaye de réguler à la fois le mental et le physique. Chacun le vit à sa manière. Pour moi, c'est la lecture. Je lis et j'écris énormément. Pour moi, lecture et écriture vont de paire durant le Ramadhan. C'est durant ce mois que je me sens beaucoup plus serein. Cela me donne une sensation de méditation. On devient un peu philosophe. Ceci ne m'empêche pas comme tout croyant de faire la prière et de relire le Coran et la Souna et tout ce qui a été écrit sur la vie du Prophète (QSSSL). Je lis aussi sur d'autres religions. L'Islam est d'essence une religion de tolérance. Assez souvent, je fais les prières surérogatoires à la mosquée. Quand je suis à Constantine, j'accomplis ces prières à la mosquée Emir Abdelkader. Ici à Alger, on se met en groupe pour les accomplir à la maison. Vous aimez les tables bien garnies ? Ma conjointe me prépare des repas du terroir. Chez nous, c'est surtout la chorba constantinoise avec du frik qui embellit la table. C'est le plat essentiel. On y ajoute un plat salé couronné assez souvent par un plat sucré comme « tajine lahlou » ou « chbah sefra ». On fait aussi du « mchelwech », une sorte de pâtes coupées en petits morceaux, imbibées d'eau de fleur d'oranger et de miel et saupoudrées de sucre glace. On rompt le jeûne toujours avec des dattes et du petit-lait. Ensuite, on accomplit la prière d'El Maghreb et on revient pour manger en famille. J'écris assez souvent au rythme d'une « nouba » ou d'une musique internationale avec beaucoup de délectation. C'est vous qui faites le marché ? Je le faisais du temps où j'étais ministre, et maintenant je fais les courses soit au marché de Staoueli, de Aïn Benian ou Chéraga. Sommes-nous en train d'accomplir un jeûne digne de notre religion ? Moi, je pense que le peuple algérien est de nature un peuple croyant et tolérant. Il aime pour lui ce qu'il aime pour les autres. Dans toutes les régions du pays, le mois sacré développe en lui le sens de la fraternité, de la solidarité et de la « rahma ». Evidemment, parfois on s'élève contre certains marchands qui profitent de ce mois pour augmenter les prix des produits de large consommation en dépit du contrôle rigoureux des institutions de l'Etat. Le Ramadhan ne doit jamais être une occasion pour s'enrichir au détriment des petites bourses. Le Ramadhan est avant tout un mois d'abstinence et de maîtrise de soi. Aujourd'hui, il faut le dire, il y a eu une sorte d'atomisation de la famille. Je ne pense pas que les gens soient devenus matérialistes ou avides puisque nos mosquées sont pleines. Sauf que ces commerçants oublient vite qu'ils fréquentent la maison de Dieu. Cela dit, il faudrait s'éduquer religieusement. La société algérienne s'est beaucoup transmutée. Les comportements ont changé en raison de cette mutation sociétale. Les messages des chaînes satellitaires ont façonné d'autres types de comportements. Je suis convaincu qu'au niveau de toutes les familles les saveurs du mois sacré sont restées intactes. Les gens se retrouvent toujours autour des mêmes plats, région par région. Faut-il maintenir le couffin de la « rahma » ? Les familles algériennes sont dignes. L'Etat ne doit pas crier sur tous les toits qu'il a fourni des aides aux nécessiteux. Les communes doivent connaître en principe les gens qui sont vraiment dans le besoin. Les ministres de la Solidarité se succèdent et il y a toujours des réflexions autour de cette question. Est-ce que le couffin est mieux que de l'argent ? Moi, je pense que toutes les aides sont les bienvenues pour les familles démunies quels que soient la manière ou le procédé. Il faut faire une réflexion pour savoir comment contribuer à soulager les nécessiteux dans l'humilité et la pudeur.