Dans la localité d'Azeffoun, à une soixantaine de kilomètres au nord de Tizi ouzou, même aux environs de vingt heures, aucun automobiliste ne pourra traverser en coup de vent sa principale rue qui longe la mer. « Beaucoup de personnes ont réservé chez nous depuis le mois de mai », confie un réceptionniste de l'hôtel Le Marin, l'un des établissements hôteliers qui transforment cette localité en une destination qui attire de nombreux estivants. Si le parc hôtelier à Azeffoun, est moindre par rapport à Tigzirt, ses plages sont meilleures. Elle n'a pas perdu surtout son petit charme, altéré à Tigzirt par la frénésie des constructeurs qui ont fait émerger dans les moindres recoins, des bâtiments. Ses plages tel Le Caroubier, à l'entrée de la ville, sont bondées de monde. Même à Azeffoun, il faut bien chercher pour trouver un coin paisible. « Cela va devenir de plus en plus difficile. Dans cette région qui, il y a une trentaine d'années, était quasi sauvage, où il fallait traverser des kilomètres entre garrigue et mer pour voir surgir une maison, le paysage est en pleine transformation. Les petits villages comme Tifezouine, Ighil Mhand ou Oulkhou, qui ont tant inspiré Tahar Djaout, ne sont plus les seuls nids de gypaètes qui surplombent la mer. Des villas de plus en plus nombreuses ont surgi à leurs alentours et il viendra le temps où des villes sans âme ni attrait verront le jour aux abords de ce tronçon de la RN-24 qui file vers Bejaïa. C'est déjà le cas à Cap Sigli où plus à l'est, à Saket. L'auberge Le Thaïs, bijou posé sur un rocher, se trouve désormais cernée par du béton. Calme et manque d'hygiène Petit Paradis ? Si cette plage, à 17 km à l'est d'Azeffoun, ne mérite pas vraiment son nom, « elle n'est pas non plus un enfer », plaisante un technicien de Sonatrach, rencontré sur place. « J'habite à Saïd-Hamdine, mais je suis originaire d'Amalou, près d'Akbou (à une centaine de kilomètres) et j'aime venir ici, pas simplement pour la plongée sous-marine. Il estime que contrairement aux plages de la capitale qui sont plus sablonneuses, Petit Paradis n'est pas polluée et peu profonde, elle est un paradis, du moins pour les enfants », explique-t-il. Un groupe de quatre jeunes venus de Boghni est ce qu'on pourrait appeler « des abonnés ». « Depuis dix ans, en groupe de quatre ou de cinq, on passe tout l'été ici dans une maison en roseaux d'où l'on écoute la douce musique du ressac », dira un estivant. Ils préparent tout, du petit déjeuner au dîner sur place en s'approvisionnant à Béni K'sila ou Azzefoun. Ce Robinson Crusoe, d'un nouveau genre, et ses amis courent le long du rivage, se reposent dans un cadre de tranquillité et de calme. Un de ces campeurs, ils sont une trentaine, fait, paraît-il, mieux. Il arrive le 10 mai et ne quitte les lieux que vers le début septembre. On observe un timide retour de la pratique du camping dans cet endroit où un camp vient d'ouvrir. Beaucoup de jeunes venaient jusque dans les années 1980, attirés par la beauté sauvage de l'endroit et le poisson qu'il faut maintenant chercher un peu plus loin. Les familles ne s'aventurent pas encore pour camper en pleine nature, mais à en croire les autres campeurs, « la sécurité existe ». « Personne ne te cherche des noises et les gendarmes ont un poste au niveau de la plage. Ils font des rondes et prennent parfois un café avec nous ». Ils sont surtout très vigilants par rapport à la drogue », susurre un autre. La plage, ce sont aussi d'autres commodités (douches, toilettes...). Au Petit Paradis, alimenté par des citernes, le concessionnaire de la plage assure une certaine propreté des lieux. C'est sans doute la raison pour laquelle les restaurants qui s'étirent le long d'une petite promenade sont boudés. La plupart des gens, sinon tout le monde, ramène leur déjeuner. L'hygiène laisse beaucoup à désirer dans ces gargotes. A 19h, moment où en principe les salles de restaurant devraient afficher complet, les chaises bleues en plastique sont soigneusement rangées et empilées. « Je préfère acheter du fromage et une bonne pastèque », confie un homme qui s'apprête à prendre la route de Boumerdès. Sur un peu plus d'une centaine de kilomètres, à Aït Rhouna, à Tamda Ouguemoun ou à Cap Djinet, il pourra bien s'attabler à un de ces restaurants-terrasses qui dominent la Grande Bleue. Mais les décharges sauvages le long du littoral amochent ce paysage féerique. On constate un léger mieux mais un émigré tenait à le dire : « Ne rêvons pas de tourisme, si l'hygiène n'est pas l'affaire de tout le monde, quartiers, villes, régions. » Le Paradis, petit ou grand, n'est pas un symbole de saleté.