L'Otan, interventionniste en Libye à feu et à sang, coupable du réarmement militaire et idéologique des filiales d'al-Qaïda sous quelque dénomination que ce soit, se porte volontaire pour combattre l'EI que les puissances occidentales ont soutenu en Syrie, sous l'étendard de l'EIIL (Etat islamique en Irak et au Levant). Bien sûr, par pur formalisme juridique, le préalable de la « demande du gouvernement irakien » est avancé pour servir de cadre légal. L'option est ainsi envisagée par le secrétaire général de l'Alliance, Anders Fogh Rasmussen, qui s'est dit, jeudi dernier, à son arrivée à Newport (pays de Galles) où se tient le sommet de l'organisation atlantique, prêt à étudier « sérieusement » une telle éventualité. « La communauté internationale, dans son ensemble, a l'obligation de stopper l'avancée de l'Etat islamique », a-t-il soutenu. Le patron de l'Otan met le pied sur l'étrier de la coalition internationale, ouverte à certains pays de la région, que Washington cherche à mettre en place en appui aux frappes aériennes menées contre le nouvel ennemi public coupable, notamment d'exécutions sommaires de deux journalistes américains alors en détention. Un otage britannique, l'humanitaire David Cawthorne Haines, risque de connaître le même sort. Mais l'alibi, qui ignore les crimes contre l'humanité commis en Syrie par le même EI accusé tardivement d'usage d'armes chimiques, n'est pas sans rappeler le rôle douteux du nouveau Laurence d'Arabie surgi de nulle part pour prendre le titre présomptueux de calife d'un émirat idéalement conçu comme le cheval de Troie du néo-Sykes-Picot de l'empire en gestation. La voie de la « coalition mondiale » à laquelle le secrétaire d'Etat, John Kerry, a appelé de tous ses vœux, est toute tracée pour conforter l'engagement américain qui rompt avec les promesses d'Obama d'en finir avec les guerres lancées par son prédécesseur. Le combat contre le terrorisme de l'EI impose dès lors une réévaluation de l'approche américaine fondée sur le renforcement de la présence militaire (350 soldats envoyés en renfort aux 800 déjà en place) et le lancement de frappes aériennes pour affaiblir les positions de l'EI et favoriser l'offensive des Peshmergas et de l'armée irakienne. A la pointe de la coalition, encadrée par une résolution onusienne en préparation, l'Europe « plus que jamais engagée », à travers son triumvirat de choc franco- italo-britannique rejoint par Berlin rompant avec sa traditionnelle réserve, a franchi le Rubicon pour envisager, comme l'a proclamé le 3 septembre dernier, le chef de la diplomatie anglaise, Philip Hammond, le scénario des bombardements aériens. Le rôle de certains pays du Moyen-Orient est tout aussi encouragé. Kerry, qui se prépare à une visite dans la région, entend plaider pour l'urgence de la coalition aux contours favorisés par le récent rapprochement irano-saoudien, concrétisé par la rencontre inédite entre le prince saoudien Al Fayçal, ministre des Affaires étrangères, et son homologue vice-ministre iranien, Hossein Amir Abdollahian, la première à ce niveau depuis l'élection du président iranien, Hassan Rohani. Le retour à l'unité des rangs du Conseil de coopération du Golf, menacée par la crise de 3 de ses membres en conflit avec le Qatar, est un autre signe significatif de la mise en place d'un dispositif régional qui sera certainement au menu de la réunion de Djedda, prévue aujourd'hui, entre ses ministres des Affaires étrangères. A doses homéopathiques, la guerre d'Irak d'Obama est ainsi lancée.