Le débat reprend de l'intensité avec les déclarations de nombreux hommes politiques français, vite tentés par des actions de cœrcition sur les pratiques de l'internet. Et les clivages politiques persistent, y compris sur cette épineuse question, tandis que l'ancien président et chef de l'opposition, Nicolas Sarkozy, annonçait sur la radio RTL qu'il souhaitait exercer une surveillance sur « ce qui se passe sur internet », Fleur Pellerin, la ministre socialiste de la Culture et de la Communication, rappelait que la France avait « les moyens juridiques de faire condamner » les comportements et propos apologétiques du terrorisme, sans toutefois pouvoir les prévenir. Pour le Premier ministre, Manuel Valls, il est question de faire établir, sous huitaine, par le ministère de l'Intérieur, des propositions concrètes, concernant « internet et les réseaux sociaux, plus que jamais utilisés pour l'embrigadement, la mise en contact et l'acquisition de techniques permettant de passer à l'acte », rapporte lepoint.fr. M. Valls a dû néanmoins préciser sa pensée, quelque temps plus tard, en indiquant, cité par lefigaro.fr : « Il ne faut pas partir de l'idée que rien ne doit bouger mais il ne faut surtout pas improviser. On ne va pas bâtir une législation dans la précipitation. » Pour rappel, la France s'est récemment dotée d'un arsenal législatif « intrusif », à la faveur notamment de la loi de la programmation militaire, en vigueur depuis le 30 décembre 2014, qui autorise une surveillance de l'internet à travers « un portail pour signaler les comportements ou les contenus jugés illicites », rapporte le site de la radio française rtl.fr, qui évoque, dans ce texte, un autre dispositif intitulé « Prévention des atteintes à la sécurité publique (PASP) », qui prévoit de « conserver et d'analyser les informations qui concernent les personnes dont l'activité individuelle ou collective indique qu'elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique », ajoute le même site. Dans les colonnes de la presse internationale, s'est instauré un autre débat auquel s'est intéressé le site de l'hebdomadaire français lepoint.fr dans un papier intitulé « Je ne suis pas Charlie à l'étranger et sur le net, la liberté d'expression fait débat ». La déferlante mobilisation internationale sur la scène parisienne, orchestrée notamment, par le président Hollande, n'a pas empêché, selon ce journal, l'apparition de « voix discordantes » qui voient en tout cela, « une communion artificielle qui escamote l'examen sur les racines du mal ou célèbre une publication ‘'raciste'' visant avant tout les musulmans ». Le site lepoint.fr reprend, pour illustration, quelques commentaires faits sur le hashtag #JeNeSuisPasCharlie de Twitter, comme celui disant « Bizarrement, quand je dis : JeNeSuisPasCharlie, on m'insulte, mais quand Charlie insulte notre prophète ça devient de la liberté d'expression », ou cet autre qui dit : stop au marketing sur les sujets les plus douloureux ». Sur les médias traditionnels, le sujet est également à l'ordre du jour avec de nombreux points de vue de personnalités se distinguant de la « foule » non pas pour se démarquer mais bien plus pour avoir le recul nécessaire pour interroger et comprendre les faits et situations engendrés. L'écrivain, photographe et historien de l'art nigérian-américain, Teju Cole, né Obayemi Babajide Adetokunbo Onafuwa en 1975, au Michigan, s'est confié sur les colonnes du journal New Yorker, pour souligner : « Ce qui est en jeu n'est pas tant le droit de dessiner ce que l'on veut mais le fait que, à cause des meurtres, les dessins doivent être célébrés et reproduits. » D'après le site lepoint.fr, qui a rapporté ces propos, le débat est également à la « une » de la presse anglaise avec notamment une prise de position du quotidien The Guardian qui considère que « Le soutien au droit inaliénable d'une publication de suivre ses propres jugements éditoriaux n'oblige pas à faire écho à ces jugements ». Lepoint.fr évoque, par ailleurs, les positions défendues par certains titres de la presse asiatique, qui, tout en condamnant les attentats, appelle à la retenue et au discernement. Ainsi, l'organe officiel du gouvernement malaisien, New Straits Times, rappelle-t-il, selon lepoint.fr, que « l'hebdomadaire français ne pouvait répandre impunément son message qui confine à la haine ». Quant au Global Times chinois, en même temps qu'il demande à la communauté internationale de garantir l'intégrité physique des éditeurs que « cela n'oblige personne à prendre parti pour leurs dessins controversés ». Dans le monde virtuel de l'internet, le débat n'est pas de moindre intensité, bien au contraire, puisque les premières actions du gouvernement français ont été adressées aux opérateurs du net pour leur demander aide et collaboration. Les informations circulant sur divers supports sur internet, notamment des vidéos ainsi que les commentaires qui ont suivi les attentats, ont suscité de multiples réactions des pouvoirs publics et même des sociétés de l'internet. Ainsi, le géant Google a-t-il fait l'objet de nombreuses pressions et critiques sur ses réponses aux sollicitations du gouvernement français de retirer des vidéos sur Youtube. Le responsable de Google France, Nick Leeder, a affirmé que des documents vidéo illégaux traitant des attentats de Paris ont été retirés suite à des requêtes du gouvernement français. Le fait de ne pas avoir donné de précisions sur les vidéos ciblées a suscité des interrogations de la presse française, dont certains titres n'ont pas manqué de noter la lenteur mise par Google à effacer une vidéo reproduisant l'exécution lors de l'attentat contre le journal Charlie Hebdo du policier Ahmed Merabet. Le site du quotidien français leparisien.fr mentionne les propos du premier responsable de Google France qui indique que sa société « travaille toujours avec les forces publiques concernant la sécurité, et un dispositif (...) a été mis en place pour les aider la semaine dernière. Nous avons notre propre politique de contrôle des contenus ». Il souligne, par ailleurs, que quand Google est saisi de demandes précises sur des vidéos illégales, « on supprime ». Le moteur de recherche tient une politique éditoriale claire en matière de gestion et de surveillance des contenus, « lorsqu'il y a des choses qui ne correspondent pas à (sa) politique, comme de l'incitation au terrorisme, (ses) équipes les suppriment automatiquement », fait remarquer Nick Leeder, qui précise cependant que le géant de la recherche sur internet tient à préserver « le bon équilibre entre la surveillance pour la protection des gens, et la liberté d'expression ». Un équilibre que les géants de l'internet sont contraints d'aller chercher devant les pressions qui s'exercent sur eux, et qu'ils tentent de trouver de manières différentes. Reconnu comme le site le plus fréquenté sur le net, le réseau social Facebook n'a pas tardé à réagir par la mise en place d'une politique de « protection des jeunes mineurs ». Le site de réseautage s'est déclaré totalement disposé à collaborer avec les autorités « en cas de demandes légales », précise lepoint.fr, qui reprend les propos d'un porte-parole annonçant que « Facebook est en train de mettre en place des messages d'avertissement et des filtres sur des contenus inappropriés ou inconvenants que ses abonnés téléchargent et partagent avec leurs amis ». Dans le cadre de l'élargissement de sa base de fréquentation, pour des besoins d'offres publicitaires, Facebook autorise l'inscription de jeunes utilisateurs à partir de 13 ans, ce qui le conduit à « instaurer des barrières pour les utilisateurs les plus jeunes afin d'empêcher par exemple les moins de 18 ans de voir des vidéos choquantes ou offensantes qui sont partagées sur leur fil d'actualité », souligne lepoint.fr, qui relaie les explications du porte-parole de Facebook, selon lesquelles, pour « les cas où des utilisateurs signaleront des contenus non appropriés, nous pourrons être amenés à mettre un message d'avertissement destiné aux adultes, et nous pourrons empêcher les jeunes utilisateurs de voir ces contenus ».Dans le sillage du débat général, né des suites des attentats, le patron de Facebook n'a pas raté l'occasion de mettre en exergue son point de vue, diffusé sur Facebook et repris par lepoint.fr. « Facebook a toujours été un endroit où les gens, à travers le monde, partagent leurs opinions et leurs idées. Nous respectons les lois dans chaque pays, mais nous n'avons jamais laissé un pays où un groupe de gens dicter ce que l'on peut partager à travers le monde. En repensant à l'attentat (...) et à ma propre expérience de l'extrémisme, voilà ce que nous devons rejeter : un groupe d'extrémistes essayant de réduire au silence les voix et les opinions de tous les autres autour du monde », explique-t-il. La presse internationale, notamment française, s'est intéressée à l'attitude des autres géants de l'internet, particulièrement le site de micro-blogging Twitter, terrain de confrontation de commentaires et autres écrits engageants. Et c'est sur terrain justement que le groupe d'hacktivistes « Anonymous » a choisi de commencer à s'exprimer en s'attaquant aux comptes Twitter considérés comme appartenant à des djihadistes qu'il révèle publiquement, tandis que Twitter, de son côté, « en a supprimé de nombreux et encourage ses utilisateurs à les signaler », note lepoint.fr qui, après avoir interrogé Twitter, a appris que ce dernier « se conformera aux décisions de justice des pays en vigueur ». Le site de l'hebdomadaire français lepoint.fr souligne néanmoins le silence observé par Twitter sur les hashtag empruntés par de nombreux utilisateurs pour faire circuler des commentaires pas conformes à la tendance générale, du genre « Je suis Kouachi ». Plus problématique semble être la stratégie de la firme Apple qui n'a fait montre d'aucune disponibilité à « collaborer avec les autorités », selon lepoint.fr, qui relève que la firme à la pomme a manifesté son soutien au journal français visé par l'attentat en brandissant le bandeau « Je suis Charlie », retiré le jour de la mise en ligne du papier du site. De son côté, le patron d'Apple, Tim Cook, a diffusé un message dans lequel il dit être « par la pensée avec mes amis en France qui marchent contre la terreur ».