Le coup de starter est donné pour tenter de renouer le dialogue interrompu depuis l'échec des pourparlers de Genève II, en février 2014. Après une première session de discussions dans la matinée d'hier, suivie dans l'après-midi par une rencontre avec le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, les 32 représentants du Comité de coordination nationale pour les forces du changement démocratique (CCND) et des Kurdes et les six membres de la délégation gouvernementale, conduite par l'ambassadeur de Syrie à l'ONU, Bachar Jaâfari, vont devoir entamer « le début d'un long processus » boycotté par la Coalition nationale, basée à Istanbul, estimant que les discussions devraient avoir lieu en pays « neutre » sous l'égide de l'ONU. Le réalisme prévaut pour sortir de l'impasse. « Nous sommes venus avec une liste de dix points. Pour éviter de faire la même erreur que l'opposition à Genève II, nous n'allons pas aborder tout de suite la question d'un gouvernement transitoire », a soutenu un des opposants, citant parmi les autres priorités, l'arrêt des bombardements, la libération des prisonniers et la mise en place des « mécanismes pour l'acheminement de l'aide humanitaire ». A Moscou, les ambitions s'affichent modestement. De façon explicite, Lavrov a affirmé que « les rencontres entre les représentants des divers groupes d'opposition syriens à Moscou ne sont pas des négociations. L'objectif est de permettre aux opposants d'élaborer une plateforme afin qu'ils puissent avoir une approche commune en vue des négociations avec le gouvernement ». Cette approche est validée par le président syrien, mettant néanmoins en cause, dans une interview à la revue Foreign Affairs, la représentativité de certains participants assimilés à des « marionnettes du Qatar, de l'Arabie saoudite ou de tout pays occidental ». L'initiative russe ne laisse pas indifférent Washington acquis à « tout effort » permettant d'obtenir « une solution durable au conflit ». La position américaine, prenant de plus en plus de distance avec le scénario de l'intervention rejeté en 2013 par Obama et abandonnant le projet de renversement du régime de Bachar El Assad, est en totale inadéquation avec les exigences de Paris, réitérées la semaine dernière par le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, appelant à l'avènement d'une Syrie sans Bachar El Assad et excluant les partenaires russe et iranien de la solution négociée. Dans le camp occidental, les réticences se font jour sur le préalable du départ d'El Assad, désormais perçu, relève dans une récente étude publiée par Rand Corporation, un think tank conservateur, comme « une victoire dramatique pour al Qaïda et l'Etat islamique », par-delà le coup dur porté à l'Iran et au Hezbollah. Face à la menace du Daech, la Syrie de Bachar El Assad se revendique d'un rôle-clé conforté par les déboires de la coalition internationale enlisée dans des bombardements improductifs. Il aura ainsi fallu plus de 700 frappes et plus de 3 mois pour venir à bout de Daech à Kobané. « L'armée syrienne, fera valoir le président Bachar El Assad, a libéré en moins de 3 semaines des villes de la même importance aux mains des cellules d'al Qaïda. » C'est cette expérience de « plus de 30 ans dans la lutte contre le terrorisme » qui s'impose. De Moscou, Bachar Jaâfari, mettant en garde contre « l'ingérence régionale et internationale sans précédent », a indiqué que « la guerre terroriste menée contre la Syrie a obligé ceux qui voilaient l'existence du terrorisme dans la région en général et en Syrie en particulier à approuver complètement l'existence du terrorisme international, notamment après que ce terrorisme s'est répercuté sur leur pays et a commencé à menacer leurs sociétés directement ».