Le Burundi renoue avec la violence. Dans un climat de tension extrême, l'assassinat par balles d'un leader de l'opposition, le président de l'Union pour la paix et la démocratie (UPD), Zedi Feruzi, à Bujumbura, a porté un coup sévère à la trêve décrétée samedi. Tous les espoirs de dialogue, favorisés par le report de 10 jours des élections législatives initialement prévues le 25 mai, se sont envolés. Dans un communiqué, la coalition de l'opposition a annoncé la suspension du dialogue, tout en appelant à la reprise des manifestations dès demain. « On ne dialoguera pas dans le sang et sous la menace de mort », a lancé la Coordination de campagne dénonçant la campagne de liquidation physique et le climat de terreur. Face à ces accusations, la présidence, qui se dit « choquée » par l'assassinat, a « demandé que la lumière soit faite de façon urgente afin que les coupables soient traduits devant la justice ». L'impasse est totale. Entre le camp des protestataires, appelant au retrait de la candidature pour un 3e mandat jugé anticonstitutionnel, et les partisans du président Pierre Nkurunziza criant à « l'insurrection » limitée à « quatre quartiers », le fossé s'est élargi jusqu'à remettre en cause le processus de négociations laborieusement engagé sous l'égide de l'envoyé spécial des Nations unies, Saïd Djinnit, en présence de représentants de l'Union africaine et des pays de la région. Cette architecture est submergée par la vague de violence qui s'installe dans un pays au bord de la guerre civile dramatiquement vécue il y a une décennie. Des manifestations quotidiennes, marquées par de nombreux heurts avec la police (25 morts en 4 semaines), l'attaque à la grenade perpétrée en plein centre de la capitale et l'assassinat du président de l'UPD contribuent à alimenter le climat d'instabilité. « Ils risquent d'accroître la méfiance et de déclencher d'autres violences dans le pays », a affirmé le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon qui, tout en condamnant ce « crime », a réitéré « ses appels au calme et à la retenue » et encouragé « les parties burundaises à poursuivre le dialogue ». 0nze jours après la tentative avortée du coup d'Etat, le spectre de la guerre civile hante de nouveau le Burundi dont « les signes avant-coureurs visibles, palpables, flagrants » sont déjà là, estime le directeur du Paris Global Forum, David Gakunzi. Dans une lettre ouverte adressée aux présidents François Hollande, Barack Obama, Uhuru Kenyatta (Kenya), Jakaya Kikwet (Tanzanie), Paul Kagame (Rwanda), Yoweri Musevini(Ouganda) et Jacob Zuma (Afrique du Sud), il a rappelé que le temps de la responsabilité a sonné. « Oui, le Burundi tangue ; il se fait tard à Bujumbura et demain il risque d'être, hélas, trop tard... », écrit-il.