Au cinéma, on ne ressuscite pas que les héros de la trempe des Ben Boulaïd, Krim ou Lotfi. Des documentaires, avec des moyens certes moindres, sont de plus en plus consacrés à des figures de chouhada moins connus. Il s'agit visiblement de faire sortir de l'oubli des patriotes méconnus, et aller au-delà de l'hommage souvent réduit au simple nom du martyr accolé à une rue ou au fronton d'une quelconque institution. C'est ce qui a motivé Mme Djamila Fernane, universitaire et nièce du chahid, et le réalisateur Moussa Tertag à faire revivre en 52 minutes la figure de Fernane Hanafi (1920-1955). Son nom orne le portail de l'hôpital psychiatrique d'Oued Aïssi à Tizi Ouzou. Dans cette dernière ville, la productrice et le réalisateur ont présenté, mardi dernier, cette œuvre à la salle de la cinémathèque. Celle-ci organise chaque soir des séances ou sont projetés des films algériens et des classiques du septième art. Le documentaire est en expression amazigh mais devrait être doublé en arabe et sous-titré en français. Il s'attache à suivre le parcours du militant. Des témoignages de proches évoquent d'abord sa jeunesse dans un village proche de celui où a vu le jour Abane Ramdane. D'autres intervenants, entre autres, Ali Yahia Abdennour et l'ex-ministre du Travail, Mazouzi, qui l'avait connu à la prison de Tizi Ouzou, dressent le portrait du militant et évoquent son engagement total. Le commentaire, qui « étouffe » un peu les débuts du documentaire, ressuscite le contexte de l'époque. La misère à grande échelle, les inégalités sociales des années 40 et 50 vont conduire Fernane Hanafi à rejoindre les rangs du PPA/MTLD puis de l'OS. Moment émouvant Par absence d'archives sonores ou même iconographiques, des épisodes du parcours du militant n'ont pas pu être dévoilés avec exactitude. Où était-il le 1er Novembre 1954 ? Quel fut exactement le rôle de celui qu'on présente comme le bras droit d'Ouamrane et de Krim à cette époque et quelle part prit-il dans l'attaque d'Ali Ferhat ? Le spectateur reste quelque peu sur sa faim. Par contre, les circonstances de sa mort en mai 1955 suite à des blessures après un accrochage avec les forces armées coloniales à Alger ont été clairement restituées par des témoins directs de cette séquence. L'homme qui avait recueilli et caché le blessé dans un hôtel et Amar Driss, un ancien militant, présentent des témoignages de première main. A la décharge de la productrice et du réalisateur, le travail de reconstitution a été mené au pas de charge. Il fallait présenter le film lors de trois journées d'hommage au chahid au début du mois de juin dernier. Au-delà de l'hommage au valeureux militant, le film a déjà permis de reconstruire sa tombe sur laquelle une de ses proches entonne un chant panégyrique, un des moments les plus émouvants du film. Une stèle de Fernane Hanafi devrait trôner sur une place à Larbaâ Nath Irathen, symbole de la résistance qui sous-tend le propos et l'image.