Il n'y aura rien de changé pour l'Iran sortie victorieuse de la bataille du nucléaire. L'accord conclu avec le P 5+1 a conforté un leadership internationalement reconnu pour un pays aux perspectives prometteuses de croissance économique bridées par 10 ans d'embargo et un gel de ses avoirs (100 milliards de dollars). Téhéran se met légitimement à rêver de lendemains meilleurs, assurément garantis par le retour sur le marché pétrolier, le poids du PIB à 500 milliards de dollars en moyenne et le rétablissement du flux d'investissement. L'enfer des sanctions, qui a coûté 480 milliards de dollars, a pavé une nouvelle ère de « coopération économique et industrielle » boostée par les opportunités juteuses dans le domaine de l'aéronautique (400 avions dans 10 ans pour 20 milliards de dollars) et des infrastructures aéroportuaires (9 terminaux internationaux), ferroviaires et routiers. Dans ce chamboulement régional où les alliances revues et corrigées se mesurent à l'aune de l'accord historique, le cap est maintenu par le guide suprême, l'ayatollah Khamenei, stigmatisant, hier, le gouvernement américain « arrogant » et tendant la main aux « amis dans la région » qui se recrutent dans le camp des « peuples opprimés de Palestine, du Yémen, les peuples et gouvernements syriens et irakiens, le peuple opprimé de Bahreïn et les combattants sincères de la résistance au Liban et en Palestine ». Dans un discours prononcé à l'occasion de la prière de l'Aïd El-Fitr, Khamenei, balayant d'un revers de main l'option du rapprochement avec les Etats-Unis, a rejeté tout « dialogue sur les questions internationales, régionales ou bilatérales ». La nouvelle donne n'est guère rassurante pour l'Arabie saoudite, attachée pourtant à la promotion des « relations amicales » et, plus encore, pour Israël hanté par une « erreur historique ». Les inquiétudes ont été exprimées par le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al-Jubeir, mettant en garde Téhéran, jeudi dernier, contre toute tentative d'utiliser l'argent généré par la levée des sanctions économiques pour financer des « aventures dans la région ». Face à la montée du scepticisme des alliés traditionnels, la campagne d'explication menée par Obama et son secrétaire d'Etat, John Kerry, s'efforce de lever les équivoques. Elle est poursuivie laborieusement par le secrétaire à la Défense, Ashton Carter, qui se rendra la semaine prochaine en Arabie saoudite, en Israël et en Jordanie pour « renouveler les engagements américains pour la sécurité de ses alliés dans la région ». Washington, qui écarte toute compensation militaire, se déclare ouvert « à toute discussion sur la coopération militaire », sans, toutefois, annoncer de « grosses propositions ou annonces à faire aux Israéliens (...) ni aux Saoudiens ». La fin d'une époque ?