C'est aujourd'hui le jour J des législatives anticipées indécises et néanmoins déterminantes non seulement pour la Grèce enlisée dans la crise, mais aussi pour l'Europe longtemps menacée par le syndrome du Grexit. Entre le Premier ministre sortant, Alexis Tsipras, rallié au réalisme et lâché par une large frange de son parti Syriza, et son rival de la droite Nouvelle démocratie, Vangelis Meïmarakis, l'issue du scrutin se jouera sur le fil du rasoir. A la reconquête de la légitimité perdue, Tsipras tente de rameuter le camp de la gauche radicale européenne, représenté par l'Espagnol Pablo Iglesias de Podemos, l'Allemand Gregor Gysi de Die Linke et le Français Pierre Laurent du Parti communiste français (PCF), pour colmater les brèches apparues sur le front interne et défendre une majorité menacée par la montée en puissance de l'opposition tout aussi confiante sur les chances de victoire. Le « résultat déterminant », aux yeux du leader de Syriza, se veut « un message » pour les autres pays soumis à des politiques de rigueur. « Nous luttons pour la grande victoire de la gauche en Grèce, pour que l'espoir se poursuive en Europe (et) le message de notre victoire sera envoyé à Pablo (Iglesias) en Espagne, à (Gerry) Adams en Irlande et à un Premier ministre progressiste au Portugal », a lancé Alexis Tsipras. Mais au-delà de la bataille des favoris en puissance, le paysage politique, qui a rompu avec le bicéphalisme incarné par le règne sans partage des socialistes du Pasok et des conservateurs de la Nouvelle démocratie, connaît une grande mutation marquée par l'éclosion de nouvelles formations politiques dont l'entrée au Parlement est presque certaine. Elles sont tenues de réunir 3% des voix. Autour de la première force politique du Premier ministre sortant, crédité de 30% des intentions de vote, et son rival de la Nouvelle démocratie, la compétition a aussi la particularité de traduire le combat des extrêmes : l'Union populaire (LAE) de la dissidence de Syriza, dirigée par Panagiotis Lafazanis et prônant une ligne anti euro, et l'ANEL de Panos Kammenos issue de la dissidence de la Nouvelle démocratie. A l'affût : l'extrême droite, Aube Dorée, ternie par les accusations sur l'assassinat du militant anti-fasciste, Palos Fyssas, du reste revendiqué par son chef Nikos Michaloliakos, et mordant sur la crise de la migration pour remobiliser un électorat crédité de 5 à 7% des voix dans les sondages, est prêt, dans la journée du 20 septembre, pour « un vote de l'indignation ». Aujourd'hui, le choix des 300 députés par le peuple des 10 millions d'électeurs façonnera, à coup sûr, le visage de la nouvelle Grèce prise en tenaille entre les exigences de réformes de l'Europe et la migration.