Sour El-Ghozlane Cette cité millénaire s'appelait Auzia et elle a la particularité d'abriter (ou d'être abritée) par un grand rempart de plusieurs kilomètres qui lui aurait donc donné le nom de Sour. Mais pour El Ghozlane, deux conceptions s'affrontent quoique la majorité penche pour la traduction de « gazelles » alors que la seconde traduit Ghozlane par « meurtrières » en référence aux ouvertures faites dans les murailles des châteaux forts et qui servaient à repousser l'ennemi en laissant passer juste le canon du mousquet. Or, à visiter le Sour, on voit clairement ces meurtrières qui ponctuent le rempart. D'ailleurs, l'avis de Missoum, le sympathique gérant du publiphone qui ne sert plus qu'à faire les recharges par le « flexy », converge vers la seconde explication et se demande comment diable les gazelles peuvent avoir un rempart. Il nous conseille d'acheter de la viande d'agneau, car il paraît qu'elle n'a pas son pareil à des kilomètres à la ronde. Nous suivons son conseil et rentrons chacun avec une grosse épaule dans les bagages. Décidément, nos randonnées prennent des allures de ripailles. Tikjda, l'enchanteresse La route serpente et au fur et à mesure de la montée, on découvre ce site magnifique, dense en fougères et en cèdres hauts comme la vue peut l'être. En vérité, nous sommes déjà venus à Tikjda à la lointaine époque où, scribe dans un journal sportif, nous venions « couvrir » les clubs de football qui venaient s'y préparer en stage bloqué. C'était avant les stages à l'étranger, devenus une mode. Mais Tikjda reste indémodable et à la haute saison, ses (rares) infrastructures hôtelières sont prises d'assaut par les familles et les groupes et il faut s'y prendre très tôt pour réserver une chambre. Durant les vacances d'hiver, l'hôtel principal est occupé par les familles et les ayants droit des fonctionnaires du ministère de la Jeunesse et des Sports, qui en a la gérance. Quant à l'auberge, elle affiche complet bien avant la ruée des visiteurs. Et on se rend compte du manque de structures d'accueil pour cette station qui aurait pu prendre un essor formidable. Comme dans les Aurès où la montagne n'a que sa beauté à offrir au visiteur et pas une seule auberge, ce tourisme spécifique en vogue sous d'autres cieux avec ses randonnées pédestres, accuse du retard chez nous. Le chalet des cheminots est situé à part et c'est là que Kateb Yacine est venu se reposer quand les médecins lui prescrivirent de cesser de fumer et de boire. L'auteur de Nedjma voulait finir ses jours dans ce site enchanteur. Il n'en aura pas le temps. Nous, non plus, nous songeons à rentrer avant que la neige déjà drue ne coupe la route. Palestro, l'embuscade Evoquer Bouira sans parler de Lakhdaria, c'est commettre un grave impair envers l'Histoire. Celle qui s'est écrite dans ces gorges en lettres de sang. L'armée coloniale qui voulait pacifier cette région chaude et « rebelle », n'hésitait pas à massacrer les populations des douars en tirant comme des lapins des « indigènes » désarmés. Alors les soldats, sans doute rassurés par leur nombre et leur arsenal, tomberont dans une embuscade meurtrière, celle qui sera historique, connue sous « l'embuscade de Palestro », menée par Ali Khodja. On dénombrera des centaines de morts côté français. Ce haut fait d'armes de 1956 marquera un tournant dans la guerre d'Algérie. Et la répression sera terrible.