La mission Exomars 2018, chargée d'envoyer un robot forer en profondeur le sol de la planète rouge, pourrait être décalée de deux ans, a indiqué Jean Wörner, le directeur général de l'Agence spatiale européenne (ESA). Les scientifiques espèrent trouver, grâce à elle, des traces de vie passée sur Mars. Initiative de l'ESA, en partenariat avec l'agence spatiale russe Roskosmos, ExoMars 2016 comprend une sonde détectrice de traces de gaz baptisée TGO (Trace Gaz Orbiter) et un atterrisseur test sur Mars, nommé Schiaparelli. C'est une fusée russe Proton qui est chargée de lancer le couple depuis Baïkonour. Après un voyage de sept mois, l'atterrisseur se séparera de la sonde pour se poser sur la planète rouge le 19 octobre. « TGO sera comme un grand nez dans l'espace », explique Jorge Vago, responsable scientifique de la mission ExoMars sur laquelle il travaille depuis 2002. La sonde, qui se mettra en orbite autour de Mars pour plusieurs années, va rechercher des traces de méthane dans l'atmosphère de la planète. Sur Terre, 90% de ce gaz est d'origine biologique et provient, principalement, de la décomposition de matières organiques. Sa détection peut donc constituer un indice possible de la présence actuelle d'une vie micro-organique sur Mars. Le méthane a en effet une durée de vie limitée. En 2004, la sonde européenne Mars Express avait déjà découvert de petites quantités de ce gaz. « La sonde TGO va essayer de confirmer cette présence de méthane et d'analyser s'il est d'origine biologique ou bien s'il est le résultat d'un processus géologique », indique M. Vago. Un éventuel « plan B » Pour sa part, le module Schiaparelli - du nom de l'astronome italien du XIXe siècle - a une visée clairement technologique : « Il vise à apprendre à l'Europe comment atterrir sur Mars », ajoute-t-il. De la taille d'une petite voiture, il doit se poser sur le site de Meridiani Planum, là où a déjà atterri le robot américain Opportunity en 2004. Schiaparelli n'est pas équipé de panneaux solaires et sa durée de vie sera éphémère : deux à quatre jours seulement. La sonde TGO jouera aussi le rôle de relais de télécommunications pour la transmission de données entre la Terre et des robots martiens dont celui d'ExoMars 2018. Si tout les clignotants sont au vert pour ExoMars 2016 - « nous croisons les doigts », dit Jan Wörner - ce n'est pas le cas pour la mission ExoMars 2018, elle aussi russo-européenne. D'abord son budget n'est toujours pas bouclé. « Nous manquons d'argent pour cette mission » côté européen, relève Jan Wörner, sans vouloir divulguer les chiffres pour le moment. Un nouvel effort devrait être demandé en particulier aux pays européens qui participent à ExoMars (Italie, Royaume-Uni, France, Allemagne...). La question sera au menu de la prochaine conférence ministérielle de l'ESA en décembre à Lucerne (Suisse). « La mission a un tel intérêt scientifique que je pense vraiment pouvoir convaincre les états membres qu'elle mérite cet argent », déclare M. Wörner. Le patron de l'ESA n'exclut pas en revanche un report de la mission. « Il y a encore tant de choses à faire ; le travail est énorme », dit-il. « J'ai encore de l'espoir. Mais d'ores et déjà je réfléchis à un plan B » qui serait de faire partir la mission en 2020, déclare M. Wörner. Les fenêtres de tir pour aller vers Mars sont en effet limitées. Le robot sera notamment chargé de percer le sol de Mars jusqu'à deux mètres de profondeur et de prélever des échantillons qui seront analysés sur place. Il explorera une zone où se trouvent des argiles très anciennes. L'espoir est de trouver des traces de matériaux organiques qui auraient pu se trouver sur Mars « il y a quatre milliards d'années lorsque sa surface ressemblait plus ou moins à celle de la Terre au moment où la vie est apparue sur notre planète », explique M. Vago.