La grève des huit jours déclenchée par le Front de Libération National (FLN) du 28 janvier au 4 février 1957 a été d'une portée politique considérable pour la poursuite de la lutte de Libération nationale, a affirmé avant-hier le colonel Yacef Saâdi au forum d'El Moudjahid lors d'une conférence organisée à l'initiative de l'Association Maâchal Chahid en commémoration de l'événement. « On a subi les difficultés les plus atroces. On embarqué des gens dans des camps de torture qu'on appelait «laboratoires». Dans ces laboratoires, des milliers de nos concitoyens ont perdu la vie. Mais on a réussi, grâce à la mobilisation citoyenne derrière l'appel du FLN qui voulait démonter qu'il était l'unique porte-parole du peuple algérien », a indiqué le principal coordinateur du débrayage au niveau de la capitale. Selon Saâdi, c'était Larbi Ben M'hidi qui l'avait instruit de la décision du Comité de coordination et d'exécution (CCE) de préparer cette grève en prévision de la tenue de l'Assemblée générale des Nations unies qui devait débattre de la question algérienne. Il a également informé que la grève devait débuter le premier jour de la rencontre onusienne et qu'il fallait se préparer en attendant que la date de la rencontre soit annoncée. Et que le lieu opportun de l'observation de la grève serait Alger, la seule ville capable de supporter le poids d'une pareille action. Ce n'est qu'en recevant une enveloppe contenant 10 millions de centimes de la part de Ben M'hidi pour couvrir les besoins de la grève, que Saâdi a compris que le jour « j » approchait. Il a eu l'idée de recourir aux femmes, artistes pour la simple raison qu'elles étaient connues et pouvaient accéder à tous les foyers algériens. Ainsi, il les a appelées pour une rencontre dans la maison du Bachagha Boutaleb, au cœur de la Casbah où logeaient 80.000 personnes sans compter les habitants des autres quartiers musulmans d'Alger qu'il fallait sensibiliser. «Chez le Bachagha, descendant de l'Emir Abdelkader, s'est regroupée une trentaine de femmes artistes qui ignoraient tout de l'ordre du jour de la rencontre. Elles se sont toutes dites prêtes à mourir pour le pays car elles pensaient qu'on allait leur demander de s'intégrer dans le réseau des poseuses de bombes », a noté l'orateur qui a dû leur expliquer qu'elles avaient une autre mission à accomplir. De leur côté, les femmes artistes ont toutes accepté de recenser les familles nécessiteuses et de leur rapporter les bons que M. Yacef affirme avoir soigneusement préparés pour garantir l'approvisionnement de la population de chez les commerçants algériens que les colons appelaient musulmans. «On a tout fait pour réussir cette mission. Heureusement que le débrayage a trouvé écho aux Nations-Unies. Aujourd'hui qu'on est indépendants, je dis que ma génération a accompli sa mission et que c'est aux jeunes de développer le pays par le biais de la science. C'est une tâche difficile mais possible», a avancé Yacef Saâdi à l'adresse des jeunes lycéens qui ont assisté à la rencontre.