Photo : Mahdi I. L'Algérie s'achemine vers la levée de l'état d'urgence dont l'instauration a été décidée, il y a près de vingt ans, «pour des considérations de lutte contre le terrorisme», nous a déclaré Me Brahimi, avocat et juriste. Selon lui, il ne fait pas de doute que le Président veut témoigner aujourd'hui de sa volonté de mettre fin à cette situation. L'état d'urgence a été «instauré par décret et c'est par décret (c'est-à-dire au président de la République) de procéder à son abrogation». Pour Me Miloud Brahimi, il n'y a pas de demi-mesure, c'est soit «son abrogation, soit son maintien», nous a-t-il dit. Le fait de charger le gouvernement d'une réflexion suppose «un allégement du dispositif ou son adaptation». Le Président devra donc, selon les juristes, attendre avant de signer cette d'abrogation que «la réflexion soit terminée» et les «outils pour poursuivre la lutte contre le terrorisme disponibles» tout juste pour qu'il n'y ait pas «une sorte de vide juridique», nous précise Me Brahimi.Ainsi, on verra sans doute un «transfert ou une sauvegarde» de certaines dispositions qui donnent les moyens de poursuivre cette lutte et ce sans recourir à l'état d'urgence. Il s'agit de préparer «les mesures adéquates».Un autre juriste, Me Farouk Ksentini, partage lui aussi cette analyse en disant qu'il n'y a pas d'autre alternative, c'est «soit le modifier soit le supprimer». On peut envisager, en effet, un allégement du dispositif «en fonction des impératifs sécuritaires», dit-il. Le Président a demandé, à ce sujet, une consultation au gouvernement. Le texte devra prendre, ainsi, le cheminement d'un projet de loi, soumis, d'abord, au Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, puis déposé devant le Parlement par le Premier ministre. Cela lui donne un aspect plus consensuel puisque l'ensemble des formations l'auront discuté au Parlement, ce qui lui donnera une dimension plus large. Le Président a estimé que l'état d'urgence avait été instauré «pour les seuls besoins de la lutte antiterroriste et c'est cette raison uniquement qui en a dicté le maintien sur une base légale». Aujourd'hui, le contexte n'est plus celui du début des années 90, période sanglante, la situation semble plus maîtrisée. Le président de la République a, de plus, donné de bons gages en répondant aux attentes de la classe politique qui avait fait part de ses appréhensions sur le maintien de l'état d'urgence qui était considéré «en contradiction avec l'exercice des libertés politiques et syndicales». On s'en souvient, plusieurs dizaines d'organisations de la société civile, des ligues des droits de l'homme avaient fait cette revendication, depuis plusieurs années déjà. En réalité l'état d'urgence n'a jamais entravé le déroulement d'une quelconque manifestation politique, campagnes électorales pour les élections présidentielles, élections législatives, locales, avec différents meetings.A part la capitale, le droit de manifestation, l'organisation de marches n'ont jamais été interdits sur tout le territoire national. De plus, le dispositif semble juste «adapté» à la lutte contre le terrorisme, pour preuve, des mécanismes qui supposent par exemple un contrôle strict sur la presse, à travers l'exercice de l'imprimatur n'ont pas été mis en œuvre.