Lorsqu'on aborde la ville par la route nationale n° 2, reliant Oran à Tlemcen, le passé colonial défile devant les yeux, au sortir du lac Sebkha de Messerghine. Des anciennes fermes coloniales et autres caves à vin surplombent des terres agricoles fertiles et autres vignobles qui jalonnent la route. Une halte à El Maleh (ex-Rio Salado), rendue célèbre grâce au roman de Yasmina Khadra « Ce que le jour doit à la nuit », édifie sur la présence coloniale dans la région. La coquette bourgade garde intact son cachet colonial, notamment avec sa place regroupant l'édifice de l'ancienne église et la mairie. El Maleh est devenu une halte incontournable pour les habitués de la région, notamment en raison de ses multiples restaurants qui offrent un agréable cadre et une ambiance bonne enfant. Le chef-lieu de wilaya n'est pas moins beau, puisqu'il allie urbanisme colonial et nouvelles cités construites après l'indépendance. Aïn Témouchent, ce n'est pas seulement de l'histoire, ce n'est pas seulement les waâdat et autre fantasia, ce n'est pas seulement la ville de Messaoud Bellemou, l'un des pionniers du raï moderne, c'est aussi une wilaya en plein essor. Cette région recèle également d'atouts touristiques de taille, à l'image de la station thermale de Hammam Bouhadjar ou encore les bassins d'El Malah et de la Tafna. Une côte attirante Mais c'est surtout sa côte, longue de 80 kilomètres, qui fait d'elle une des destinations touristiques les plus prisées. A l'est de la ville, la première plage témouchentoise est Madagh 2, la crique jumelle de Madagh 1, située dans le territoire oranais. Une plage d'une beauté époustouflante et à l'état sauvage. Juste des postes de la Gendarmerie nationale et de la Protection civile, une tente pour l'unité de santé de proximité, et beaucoup de jeunes loueurs de chaises et de parasols. En longeant le chemin escarpé de la côte, nous atterrissons, 15 kilomètres à l'ouest, dans la somptueuse plage de Bouzedjar. De loin, un complexe touristique à l'architecture qui rappelle celle des ruches d'abeilles trône sur la grande baie. Plus loin, c'est le petit port de Bouzedjar, qui fait le bonheur des pêcheurs de la région. S'ensuivent les enivrantes criques de Sassel et de Targa où le béton a fait des ravages et où les prix de location de maisons pour l'été flambent. Targa, particulièrement, avait la possibilité de rivaliser avec les meilleures plages du pays, si la construction ratée des bungalows à même la mer n'a pas agressé le paysage. N'empêche, les plages, comme celle de Sassel, connaissent une grande affluence, pas seulement des habitants, mais des vacanciers venus de partout. Mais c'est surtout les plages situées entre Béni Saf et Rechgoune qui attirent le plus grand nombre d'estivants et qui font toujours la réputation d'Aïn-Témouchent. Sur la route de Béni Saf, la plage de Sidi Djelloul connaît une grande affluence. Cette immense plage de sable fin, cernée de forêts de pins, ne dispose, cependant, d'aucune commodité. C'est l'endroit prisé notamment par les gens de la région qui viennent bardés de nourriture, d'eau et d'articles de plage. L'entrée de Béni Saf est quelque peu repoussante pour qui visite l'endroit pour la première fois. Sa cimenterie, dont la poussière est visible à plusieurs kilomètres à la ronde, et son urbanisme sauvage vous donnent cette impression d'étouffer tout en descendant les ruelles encombrées, en espérant gagner, au plus vite, le bord de mer. Les plages sont bondées de monde et il est difficile de trouver une place pour les retardataires. L'ambiance est bonne enfant et le mélange entre autochtones, vacanciers venus des quatre coins du pays et émigrés, se passe plutôt bien. Des maisons collées à la mer, de même que des hôtels privés donnent un sentiment d'éxiguïté et c'est à travers des ruelles étroites que l'on accède à la plage et une fois sur place, on oublie tout le reste. Dans un petit café-restaurant dont la terrasse se trouve en pleine plage, nous rencontrons Samir, un émigré de Roubaix. Il dit « savourer » ses vacances en bord de mer, « dans une ambiance excellente ». Avec ses amis, ils ont loué une maison « pieds dans l'eau », qui leur revient à « 300 euros chacun pour quinze jours. C'est vraiment donné, surtout dans un cadre pareil. En plus, le poisson ici est un vrai régal et il y en a pour toutes les bourses ». Pendant notre courte conversation, le courant électrique faisait des siennes. Samir en riait. « Chaque jour, on vit au rythme des coupures de courant et des chutes de tension, avec la concentration démographique et l'utilisation des climatiseurs, c'est normal, et on s'y habitue », indique-t-il. Seul point noir, à son avis, « ces favelas qui surplombent le port et sa pêcherie et qui rappellent celles de Rio de Janeiro. On devrait reloger ces gens dans des habitations décentes et bâtir à la place des complexes touristiques dont la ville manque cruellement ». En effet, à Béni Saf, seul le complexe public Sigha tente de répondre à une infime partie de la forte demande des estivants. Hamid, lui, est venu de Blida. Ce n'est pas son premier séjour ici et ce ne sera pas le dernier, tient-il à préciser. « J'ai fait la connaissance de gens formidables. Et chaque fois, je réserve pour l'année d'après. C'est vrai que pour dénicher une bonne location, il faut s'y prendre à l'avance, et surtout connaître des gens », explique-t-il. Nous poursuivons notre route en remontant la forêt menant vers Rechgoune et sa fameuse île. Nous marquons une halte à la plage de Madrid. Dans cette localité, les responsables locaux essayent de sauvegarder le domaine maritime et d'aménager la façade. Sur les hauteurs, un parc d'attraction pour les enfants, un complexe touristique qui a ouvert ses portes depuis une année, et surtout une allée pour admirer toute la baie de Rechgoune. Les constructions individuelles, quant à elles, sont tenues loin du tracé littoral. La forêt de Rechgoune, en partie aménagée, reçoit beaucoup de familles, et surtout d'enfants, qui préfèrent jouer, déjeuner ou même faire la sieste sous les arbres, au vacarme de la plage. En descendant vers la plage de Rechgoune, les rues deviennent de plus en plus étroites, la circulation de plus en plus difficile. Ici, la majorité des maisons sont louées, y compris celles encore à l'état de « carcasses ». L'immense plage est bondée de monde et les complexes touristiques situés sur les deux extrémités de la baie affichent complet. L'île de Rechgoune, somptueuse et imposante, reste interdite aux vacanciers et aux pêcheurs. C'est dommage, mais c'est mieux que de la voir dégradée par des comportements irresponsables. Plus loin, vers les limites avec la wilaya de Tlemcen, Souk El Tenine, dans la commune d'Oulhaça, avec son immense plage de sable fin, reste quasi vierge, tout comme la plage mitoyenne d'El Wardania. Une région, jusque-là abandonnée et oubliée des projets d'investissements touristiques. Et pourtant, elle dispose de potentialités avérées pour rivaliser avec les autres destinations touristiques de la wilaya.