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Rencontre avec la femme des tréteaux : «Un comité artistique pour promouvoir la qualité des créations théâtrales bientôt installé»
Publié dans Horizons le 22 - 03 - 2011

On dit que Sonia est une femme battante. Qu'en est-il ? En effet. Je suis réellement une femme battante dans mon métier. Il convient de dire que cette profession n'est pas une sinécure. Il est vrai que ce métier s'apprend en un temps et trois mouvements. Cependant, il requiert une patience à toutes épreuves et un apprentissage au long cours que seuls les passionnés peuvent endurer. J'estime qu'il faut être un battant pour aller jusqu'au bout de ses ambitions.
Directrice d'un théâtre et comédienne ; ces deux fonctions sont-elles compatibles ?
C'est évident, diriger un théâtre et être comédienne sont deux mondes différents. Ceci dit, l'avantage c'est que je peux mettre mon expérience au profit de la jeune génération, car les portes sont ouvertes à tout le monde.
Depuis que vous êtes à Skikda, pouvez-vous nous faire une évaluation de vos réalisations ?
Je peux dire aujourd'hui qu'on a relevé le défi au théâtre regional de Skikda vu qu'on a mis sur pied, durant dix-huit mois, sept productions théâtrales. Nous sommes actuellement en train de préparer une œuvre qui s'intitule Thawrat Belahrach pour le compte de la manifestation Tlemcen, capitale de la culture islamique. Aujourd'hui, on peut se vanter d'avoir formé une ossature permanente de comédiens.
A qui pensez-vous ?
La liste est longue. Je considère que chaque comédien dispose d'un talent avéré. On peut citer Zinnedine, Ali, Saïf Eddine, Nadia, Ahlam. Je tiens à souligner que le ministère de la Culture nous soutient avec des subventions. Ce même ministère alloue annuellement trois millions de dinars pour assurer la formation des jeunes comédiens (chant, chorégraphie, scénographie, technique…). Cette démarche ne peut que contribuer à l'essor du 4e art dans notre pays.
Votre métier de comédienne reste-t-il toujours vivant en vous par une présence régulière sur la scène de théâtre ?
Je suis comédienne et je fais aussi de la mise en scène. Faire de la mise en scène m'aide à combler quelque peu le manque des planches. Un comédien est analogue à un sportif. Dès qu'il s'arrête, la machine s'arrête avec lui. Je jouerai probablement dans l'œuvre «Une femme en papier» de Waciny Laredj, adaptée par Mourad Senoussi. Ce spectacle va être réalisé en co-production avec le TNA (Théâtre national algérien). Cette œuvre est programmée pour la fin de l'année 2011.
Le théâtre est-il encore d'actualité dans le monde d'aujourd'hui où les multimédias règnent en seigneur ?
Si le théâtre avait à disparaître, il aurait disparu il y a longtemps. Il est vrai que l'expansion technologique règne en seigneur. Les multimédias ont envahi les foyers algériens mais, ils n'altèrent pas l'évolution, la distribution et la création théâtrales. Je pense plutôt que ces nouvelles technologies seront profitables au 4e art.
2011 est l'année de la culture islamique à Tlemcen. Comment y contribuez-vous ?
On a entamé depuis quelque temps les premières répétitions de l'œuvre « Boudali ou la révolution de Belahrache ». Cette œuvre s'inscrit dans le registre de l'histoire. La trame de l'histoire gravite autour d'une révolution menée dans l'Est de notre pays. Les événements tournent entre Belahrache qui s'est soulevé au début du XVIIIe siècle contre le régime du Baylak de Constantine. La générale de cette œuvre est prévue le 10 avril à Tlemcen.
Est-ce important de disposer d'un centre de documentation et d'archives théâtrales ?
Bien évidemment. Il est nécessaire d'archiver nos œuvres, nos costumes, nos photos, nos affiches. Cette démarche contribue à préserver ce patrimoine pour pouvoir le transmettre aux générations futures.
Ne pensez-vous que l'absence d'une véritable critique théâtrale risque d'être un frein à la promotion du 4e art ?
Une critique satirique ou positive est importante dans la mesure où elle évalue la travail fait. Cependant, la critique dans la presse (certains journalistes débutants) demeure de manière générale faible. Il est important de savoir que la critique culturelle ainsi que les outils et moyens mobilisés pour la pratique de la critique culturelle visent essentiellement à enrichir la pensée.
Comment investissez-vous dans le théâtre ?
Notre préoccupation majeure demeure la formation. C'est un problème de fond. J'estime qu'on ne peut exceller dans un métier sans être encadré. A l'instar d'autres métiers, le théâtre nécessite une formation.
Plaidez-vous pour la promotion de la création artistique afin de répondre aux attentes du public ?
Indubitablement. Je plaide pour la promotion de la création artistique.
Estimez-vous que le théâtre pour le jeune public doit représenter une récréation pour les enfants ?
Nous avons aujourd'hui une programmation régulière pour enfants. A chaque représentation, la salle affiche complet. Les spectacles consacrés au jeune public permettent à l'enfant de s'imprégner de nouvelles sensations et de rêves à même de contribuer à équilibrer sa personnalité et ancrer en lui des valeurs sociales d'une culture plurielle.
Le théâtre expérimental est défini par les spécialistes comme une tentative de dépasser les habitudes, le dominant, le déjà vu et l'héritage. Etes-vous du même avis ? Et pourquoi ?
J'estime que chaque œuvre est par définition une expérience. A titre d'illustration, l'œuvre Assouar el madina (Les murs de la ville) est une adaptation du célèbre dramaturge et cinéaste allemand, Tankred Dorst. A mon avis, cette œuvre s'inscrit plus ou moins dans le registre du théâtre expérimental vu que nous introduisons dans un des tableaux, une scène verticale plutôt qu'horizontale.
Certains théâtres comme celui d'Oran, ont mis en place un comité artistique pour promouvoir la qualité des créations théâtrales. Qu'en est-il de votre théâtre ?
De toute façon, notre statut stipule la nécessité de mettre en place un comité artistique pour promouvoir la qualité des créations théâtrales. On compte l'installer bientôt.
Peut-on connaître le programme de l'année 2011 du théâtre regional de Skikda ?
Vu que le théâtre regional de Skikda connaît en ce moment une phase de réhabilitation, il est difficile d'arrêter un planning à moyen et long terme.
Comment définiriez-vous le travail d'un acteur de nos jours ? Quelle est, selon vous, la différence entre l'ancienne et la nouvelle génération ?
Le travail d'un acteur est complexe et simple à la fois. Il faudrait, avant tout, exercer ce métier avec vocation. Autrefois, nos aînés avaient l'âme artistique, c'est-à-dire qu'ils accomplissaient avec passion leur métier. En plus, ils avaient le respect de l'autre. Aujourd'hui, les choses ont changé. Vu les conditions de notre vie, certains acteurs en font une activité lucrative.
N'est-ce pas le propre d'une culture de se mélanger pour avancer ?
Oui, la nature n'aime pas l'immobilisme, tout est toujours en mouvement. Une culture qui veut avancer doit forcément s'ouvrir au monde et à d'autres richesses culturelles.
C'est quoi le plus important pour vous, camper des rôles, échanger les savoirs et les expériences ou transmettre des messages ?
Ces missions vont de pair, car à mon sens, un comédien doit saisir l'opportunité de la visibilité qui lui est conférée pour l'impliquer dans la promotion des valeurs de la société dans laquelle il vit ou celle des valeurs humaines universelles.
La papote, vous en faites ou vous contentez-vous d'apprécier la bonne table ?
Bien évidemment. Comme toute femme, je cuisine. Je cuisine un peu de tout. Cela va des plats traditionnels aux mets modernes. Je dois admettre que j'ai un penchant particulier pour la préparation du couscous sous toutes ses formes.
Des lectures et auteurs préférés ?
J'adore la lecture mais il m'est difficile de trouver un temps libre pour m'y consacrer.
Un livre de chevet ?
«Belle du seigneur» d'Albert Cohen. Je pense que c'est le plus beau roman d'amour. Le roman raconte l'amour fou d'Ariane et de Solal, mais aussi d'une certaine façon l'amour de Cohen pour la langue française et pour l'écriture. «Belle du Seigneur» est considéré comme l'un des grands romans de langue française du XXe siècle, qualifié de chef d'œuvre absolu.
Pratiquez-vous du sport ?
Malheureusement, je ne pratique aucun sport. Ceci dit, je considère que le théâtre est un sport complet, car un comédien est constamment en mouvement.
Quel genre de musique aimez-vous ?
Le chaâbi, l'andalou, le malouf et la musique classique.
Un dernier mot ?
Je souhaite la réussite à l'ensemble des comédiens de notre pays particulièrement ceux du théâtre regional de Skikda.


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