L'inquiétude grandit en Tunisie qui se prépare au retour des milliers de combattants terroristes de Daech poussé dans ses derniers retranchements en Irak et en Syrie. Avec quelque 5.500 ressortissants ayant rejoint les rangs d'organisations terroristes, selon des chiffres de l'ONU, la Tunisie est l'un des principaux pays au monde touchés par ce fléau, le premier au Maghreb, loin devant le Maroc (environ 1.300). La vigilance est de rigueur dans un pays durement éprouvé par les attentats sanglants du musée de Bardo (mars 2015) et de Sousse (Juin 2015). Vendredi, au Parlement, le minsitre de l'Intérieur, Hédi Mahjoub, a non seulement révélé la présence de 800 combattants déjà de retour de Syrie, mais également évoqué l'éventualité des revenants inconnus des autorités. Face au risque de « somalisation », redouté par le syndicat national des forces de sécurité intérieure, le gouvernement de Youssef Chahed a tenu une réunion ministérielle pour dégager « un plan d'action » pour affiner une « stratégie globale » établie par la présidence et la décliner de manière sectorielle. Elle s'articule sur quatre axes fondamentaux : la prévention, la protection, les poursuites (judiciaires) et la riposte. La bataille s'annonce évidemment âpre en l'absence d'un consensus national sur le principe du retour des combattants terroristes rejeté par la société civile et même par des partis et des responsables politiques. Des centaines de personnes ont manifesté devant le Parlement, samedi, pour exprimer leur refus des terroristes. Alertant sur les dangers des « cellules dormantes » et le renforcement du « cercle du terrorisme », le syndicat national des forces de sécurité à même appelé à la déchéance de la nationalité que rejette catégoriquement le président Béji Caid Essebsi. « On ne peut empêcher un Tunisien de revenir dans son pays », dira-t-il. « Mais évidemment nous allons être vigilants », avait-il lancé début décembre à Paris. Cette position a été défendue par le dirigeant du mouvement Ennahda, Rached Ghannouchi, estimant que personne ne peut s'opposer au retour des terroristes et que la Tunisie ne peut se permettre d'imposer aux autres nations ces individus. Il a souligné que le terrorisme est une maladie qui requiert un « traitement judiciaire et sécuritaire bien déterminé » et que les « patients » auront plus besoin de « soins d'ordre culturel et psychiatrique ». Le défi est à la hauteur de la « bombe à retardement » que suscite indéniablement « tout terroriste de retour ».