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Autisme : La lourde prise en charge de l'Etat et la douleur des parents
Publié dans Horizons le 28 - 09 - 2011

Photo : Horizons. Selon les statistiques fournies par l'OMS, il y a une dizaine d'années, il a été recensé 1 autiste pour 300 naissances. Mais actuellement, selon le Pr Mahmoud Ould Taleb, un des éminents pédopsychiatres algériens, il y a 1 autiste pour 150 naissances. En Algérie, ils sont environ 70 à 80.000 alors que les places en milieu hospitalier ne dépassent pas la centaine.
Faute de personnel, de services spécialisés et d'équipements, la prise en charge s'avère dramatique, sans compter le désarroi des parents qui ne savent pas à quelle porte frapper. Ces derniers habitent loin, ne savent rien de la maladie et se retrouvent ballottés de pédiatre en pédiatre, jusqu'à perdre patience. Ce n'est que tard qu'un psychologue rencontré au gré des hasards que les parents découvrent la vraie maladie dont souffre l'enfant. Ils sont alors orientés vers le centre de pédopsychiatrie de Garidi II pour une prise en charge, l'unique structure spécialisée à l'échelle nationale.
Samira L. vient d'un petit village de Berrouaghia dans la wilaya de Médéa. Son enfant âgé de 4 ans est autiste. Sur ses genoux, ses yeux tournent dans le vide, parfois il est sage et parfois, il est agité. De temps en temps, il pousse un cri. Elle s'est aperçue que son enfant, alors âgé de 18 mois était différent des autres. Par exemple, il ne rit pas, ne se plaint pas, n'aime pas qu'on le touche, ne parle pas. Sa première idée est de voir un pédiatre à Blida. Ce dernier n'a rien trouvé d'anormal. Une voisine lui a suggéré de l'emmener chez un orthophoniste, à Chéraga, pour voir s'il a un trouble du langage. Ce spécialiste a diagnostiqué l'autisme et l'a recommandé au Pr Ould Taleb.
Depuis deux ans, et à raison de deux séances par semaine, cette maman courage ramène son enfant chez une thérapeute pour lui inculquer les exercices d'imitation des choses ou des comportements. Ceux qui sont diagnostiqués à 18 mois ont une chance d'être scolarisés et terminer le cursus primaire. Les autres, c'est le grand point d'interrogation. Aucune structure sanitaire, aucune école spécialisée n'existe pour prendre le relais et soulager les parents.
B. Nadjia a une fille autiste. Elle attend son tour chez la thérapeute. Contrairement à Samira, elle fait partie de l'association des autistes. L'état de sa fille s'est amélioré un tout petit peu. Mais le grand travail, c'est elle qui le fait à la maison. Par exemple, elle a habitué sa petite à pointer de son doigt les choses, à répéter les gestes, de l'initier au langage, etc.
L'ASSOCIATION, UN REPÈRE INCONTOURNABLE POUR LES PARENTS
En 2007, une association est créée par Mme Baya Nouri, pharmacienne de son état. Elle est intitulée «Association de l'Enfant Autiste, (AEA)». Son but est d'uniformiser la pose du diagnostic. Elle estime que les deux services de pédopsychiatrie, à savoir Chéraga et Drid-Hocine travaillent chacun avec un procédé. Le premier utilise la méthode A.B.A (Applied Behaviour Analysis), c'est-à-dire une analyse appliquée du comportement créée par l'Américain Ivar Lovaas. L'autre méthode est «TEACCH» qui signifie programme et traitement pour les enfants atteints d'autisme et de trouble de la communication. «Pour certains parents, l'essentiel est que l'enfant autiste acquière les méthodes qui lui permettent d'avancer et de s'insérer dans la société», précise Mme Nouri. Toutefois, elle signale que si la méthode «TEACCH» est mal appliquée, l'enfant devient comme un robot. De ce fait, la présidente de l'AEA table sur la formation du personnel en charge de ses enfants pour une prise en charge de qualité. Elle estime qu'il y des orthophonistes, des psychologues pour les autres maladies lourdes, mais presque rien pour la petite enfance en difficulté.
L'autre combat de l'AEA est la formation des médecins et des pédiatres pour diagnostiquer précocement la maladie. «Plus l'enfant est diagnostiqué précocement, plus il a de la chance d'intégrer l'école», souligne-t-elle. «Là encore, au sein de l'école, il faut un accompagnement avec des auxiliaires de vie scolaire», dit-elle, comme cela se fait sous d'autres cieux. Car chaque autiste est un cas, donc pas le même protocole pour tous les malades du fait que cette pathologie n'a pas de cause. Elle est multifactorielle et touche plus les garçons que les filles et chez les jumeaux, on peut détecter l'autisme chez l'un et non chez l'autre.
Pour les autistes intégrés dans des écoles ordinaires, Mme Nouri met en avant le problème de l'encadrement qui n'a aucune notion sur cette maladie. Pour cela, la présidente de l'association préconise une prise en charge multisectorielle. Et pourquoi pas un «plan national de l'autisme» où les secteurs de l'éducation nationale, la solidarité et la famille, la santé, les sports et le mouvement associatif set réunissent, afin que chacun fasse une suggestion. Les parents des autistes qui n'ont pas les moyens doivent être aidés par les pouvoirs publics pour surmonter le handicap de leur enfant.
A titre d'exemple, une séance chez l'orthophoniste relevant du secteur privé coûte 800 dinars alors que la pension des handicapés s'élève à 3 000 dinars mensuellement. Et Passe des autistes adultes qui n'ont pas de projet de vie. Les pouvoirs publics sont plus que jamais interpellés pour leur trouver un espace et leur apprendre un métier manuel. Contrairement aux autres associations qui activent grâce à l'apport de subventions, l'AEA espère des pouvoirs publics la mise en place d'un cadre plus appropriée : la formation d'un personnel qualifié et un espace pour mettre en place la méthode A.B.A. Car le premier objectif de cette association est de faire des autistes des personnes autonomes et pas des génies.


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