La taxe carbone aux frontières constituera, selon des spécialistes, la porte étroite du sommet sur le réchauffement planétaire qui s'ouvrira aujourd'hui à Copenhague (Danemark). Des pays industrialisés- poussés notamment par la France et l'Allemagne- évoquent la possibilité d'instaurer une taxe aux frontières de l'Union européenne sur les produits importés de pays émergents (producteurs d'hydrocarbures) sur leurs émissions de CO2, et ce « en cas d'échec des négociations de Copenhague, pour protéger les industriels européens contre une concurrence déloyale ». Sollicités à donner leurs opinions sur la question, des experts avancent des points de vue communs. Ils estiment que la finalité reste le maintien du fossé séparant les pays développés et ceux en voie de développement (PVD). L'économiste Salah Mouhoubi constate dans la taxe que les pays riches veulent imposer aux pays émergeant «une manière de faire de la diversion» soit, poursuit-il explicitement, «les pays industrialisés ou dits développés tenteront de se montrer lors de ce sommet comme les moins polluants». Cet expert estime qu'en cas d'aboutissement de la démarche, les retombées seront lourdes pour les pays en voie de développement : «3 000 milliards de dollars à perdre d'ici l'année 2050», a-t-il estimé approximativement. Il suppose toutefois que les pays en voie de développement ne laisseront pas les pays développés leur imposer leurs conditions pour contenir le réchauffement climatique. Cette analyse est partagée par un autre expert en économie, Boussaid Ahmed, qui soutient que le G77, regroupant les pays en développement au sein de l'ONU, rejettera sans doute «cette imposition injuste», a-t-il qualifié. «Il est exclu que les pays du Sud acceptent de nouvelles taxes pénalisantes. Le groupe d'Afrique aura une position ferme durant les négociations pour défendre les intérêts des pays du Sud», a-t-il enchaîné. Dahou Fayçal, universitaire, spécialiste en commerce international, indique, lui, que la taxe envisagée ressort beaucoup plus de «la politique commerciale». «Limiter les émissions de CO2 nécessite de mettre un prix sur ce qui jusqu'ici était gratuit», explique M. Dahou qui, par ricochet, trouve «légitime» l'instauration d'une taxe sur le plan «économique, écologique et juridique». En cas de rejet catégorique de la taxe, il prévoit, en échange, une baisse de tarifs, sur des importations en provenance de pays producteurs d'hydrocarbures. A signaler que la position de l'Algérie sur la question a été exprimée par le ministre de l'Environnement, Chérif Rahmani, qui y voit «un problème d'équité et de justice». Le ministre observe que «les pays pétroliers subissent de plein fouet les effets des changements climatiques du fait qu'ils sont en grande majorité des pays désertiques et vulnérables».