Le 4 janvier 1960 disparaissait brusquement Albert Camus considéré comme le géant de la littérature contemporaine. Aujourd'hui, jour pour jour, 50 ans après, l'auteur de «L'étranger» et prix Nobel marque encore plus le monde de la littérature et de la philosophie. Albert Camus l'enfant de Belcourt a été littéralement attaché à son sol. L'Algérie est pour lui sa terre natale qu'aucun autre lieu ne peut remplacer. C'était un européen mais pas imbus de complexe de supériorité qu'avaient ses concitoyens envers le peuple algérien autochtone. Cette attitude s'explique par le fait qu'il avait une origine humble. Cette condition sociale l'a amené à vivre dans un quartier pauvre de l'époque coloniale, Belcourt. Il a ainsi côtoyé les petites gens qui ont façonné ses idées, des personnes affables et généreuses envers les couches sociales défavorisées. C'est pourquoi, dès son éveil à l'écriture et à la vie professionnelle, il intègre le parti communiste algérien, un milieu où la soif de justice et d'égalité constituait le crédo de ce parti. A cette époque, le parti communiste algérien était la seule organisation politique empreint d'un esprit fraternel avec le même idéal européen et musulman. C'est de là qu'Albert Camus a façonné des idées nationalistes en faveur d'une Algérie loin de l'emprise coloniale. Son art dans l'écriture a contribué à comprendre la situation misérable vécue par les populations algériennes. Journaliste au quotidien communiste «Algérie Républicain», il a réalisé un long reportage sur la misère en Kabylie. Au déclenchement de la révolution en 1954, il était déchiré par les murs qui séparaient les deux communautés. En sa qualité d'européen, il était difficile de se ranger ouvertement du côté du FLN. Il n'a pourtant pas cessé d'œuvrer à la recherche d'une voie contre la violence. Dans cet esprit, Albert Camus s'est impliqué personnellement avec d'autres algériens pour trouver une issue à la guerre. C'est son intervention en public dans une salle d'Alger où il a fait un discours qui a été rejeté par les européens de l'époque. Albert Camus se rapproche des thèses du parti réclamant l'autonomie de l'Algérie et qui est le PPA. Il manifeste sa sympathie pour Messali El Hadj. Il soutient ses revendications ce qui lui attire les foudres des ultras de la communauté pieds noirs, comme cela a été dit plus haut. Ces derniers l'empêchent même de tenir un discours libéral en faveur de la cause algérienne. Plus tard, en France et après l'obtention du prix Nobel, Albert Camus intervient personnellement auprès du général de Gaulle pour l'amnistie de plus d'une dizaine de nationalistes algériens. La mort l'a surpris ce qui aurait mis au jour davantage sa prise de position pour une Algérie indépendante dans un contexte libéral. Parallèlement à sa vie politique, Albert Camus a mené une très brillante carrière dans la littérature couronnée par le prix Nobel. Ces œuvres sont lues et traduites pratiquement dans le monde entier. Rappelons que dernièrement, le président français Nicolas Sarkozy a émis le souhait de voir transféréé la dépouille de l'écrivain du cimetière de Lourmarin, en Provence, au Panthéon où reposent déjà des monuments de la littérature française comme Victor Hugo, Jean-Jacques Rousseau ou Emile Zola. Sa notoriété est telle qu'il sera dans un temps plus au moins court sacré au Panthéon, temple de la très haute culture et de l'immortalité. Pour l'Algérie, Albert Camus restera toujours ce géant de la littérature qui a œuvré pour un rapprochement des communautés dans l'esprit d'ouverture, de générosité et d'hospitalité du peuple algérien.