Le mouvement palestinien Fatah a voté pour le changement et le rajeunissement de sa direction. Quatorze des 18 postes au Comité central, l'une des deux instances dirigeantes du mouvement avec le Conseil révolutionnaire, sont revenus à de nouveaux élus à leur tête Marwan Barghouti, l'un des chefs militaires de la seconde Intifada, condamné à la prison à vie, auxquels s'ajoutent d'autres figurent emblématiques que sont Saeb Erakat, Jibril Rajoub, Ahmed Azam, Sultan Abul Inine, Mohammed Aloul, Tawfik Tairaoui, Mohammed Madani, Othmane Abu Ghariba, Hassan Cheikh, Djamel M'hissen, Mohammed Achtih et Nasser al Kidoua, neveu du défunt Yasser Arafat pour qui «ce résultat inattendu est un grand bouleversement». Enfin, Mohammed Dahlan, l'ancien homme fort de la bande de Ghaza, très contesté, a fait aussi son retour. Parmi les dix membres de la direction sortante qui se représentaient, quatre seulement ont été élus. Il s'agit de Abou Maher Ghanim, Tayeb Abderrahim, Nabil Chaât et Salim Zaânoun. Alors qu'à la surprise générale, l'ancien Premier ministre Ahmed Koreï, l'un des principaux négociateurs des accords israélo-palestiniens d'Oslo en 1993, a perdu son siège. Parmi les perdants figurent également Abdallah al Ifrindji et Tayeb Abderrahim, le secrétaire général de l'Autorité palestinienne. Le Comité central compte 21 membres pour 120 au Conseil révolutionnaire. Dix-huit membres de la première instance et 80 de la seconde étaient soumis à l'élection, tandis que les autres seront désignés par la nouvelle direction. Samedi, le délégués ont réélu le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas à l'unanimité à la tête du mouvement qu'il dirige depuis 2004. Mais l'élection de Barghouti au Comité central pourrait l'affaiblir. Ce dirigeant est populaire et respecté par les mouvements rivaux contrairement au président qui est critiqué même au sein de la formation qu'il dirige. «Barghouti pourrait être un bon leader pour le Fatah car il a les qualités requises de dirigeant. Les gens l'aiment et le Fatah dépend du soutien populaire», a déclaré à la presse Moundhir Amira, un militant réformiste. Le grand chamboulement prévisible au sein du Fath-historique signe une volonté de changement indéniable. Aux yeux de Dahlan, la mutation interne marque «la rupture entre le passé et le futur» dans un double message délivré par le scrutin.Le Fatah qui fait peau veuve se veut l'expression d'un dépassement des archaïsmes politiques et d'une gestion contestée du principal parti de l'organisation palestinienne gangrenée par les pratiques de corruption, la perte de crédibilité et l'enlisement générateur de divisions. Dans cette descente aux enfers de celui qui fut le socle de la résistance, gravement marquée par la bipolarité politique de la Cisjordanie et de Ghaza viscéralement opposé en guerre fratricide, l'alternative favorise une nouvelle dynamique et une reprise en main du parti historique laminée parles échecs électoraux des législatives de 2006 et, surtout, la déroute totale de Ghaza, en 2007. Le retour aux affaires des cinquantenaires, emmenés par la figure de proue de la résistance palestinienne, est tout naturellement la confirmation du « droit à la résistance contre l'occupation, conformément à la loi internationale» de nature à garantir une «paix juste» renouvelée au congrés de l'unité et du renforcement des rangs. Le Fath-historique, fort du changement de sa composante, tend la main au frère ennemi du Hamas invité à approfondir la relation stratégique pour affronter le défi commun et se mettre au diapason des réalités régionales et mondiales nouvelles d'une rare importance pour le devenir du mouvement de libération de la Palestine occupée.