Mme Rahmani Messaouda Saada (membre de la commission exécutive nationale de l'UGTA ) : « Malgré certains acquis,beaucoup reste à faire » Pour cette syndicaliste, le 8 Mars de cette année se commémore dans un contexte économique caractérisé par une « fragmentation » de la société. « L'heure n'est pas aux fleurs et aux discours, car beaucoup d'acquis sont menacés par la mondialisation libérale et le monde du travail, secoué par de nombreuses turbulences, vit dans un sentiment d'insécurité et d'inquiétude », a-t-elle ajouté. « Bien que l'UGTA œuvre pour un principe fondamental, celui de combattre les inégalités et l'exclusion et de construire un syndicat fort et moderne, dans la question de l'égalité homme femme, un mélange de tergiversation et de volontarisme persiste encore, même si cette question fait partie ces dernières années du débat syndical national », a-t-elle fait remarquer. « A tort », indique-t-elle. « On estime que c'est une question féminine et qu'à ce titre elle doit être portée par les femmes alors qu'elle est le point focal des droits de l'homme et l'essence même de la démocratie ». Et de poursuivre : « Le sujet reste difficile, délicat et très sensible en raison de la difficulté dans sa compréhension du fait des stéréotypes erronés allant en contradiction avec la norme législative nationale et les conventions internationales ratifiées ». Maître Fatima Benbraham avocate agréée auprès de la Cour suprême : « Le code de la famille doit être amendé » « La femme a réussi à s'imposer dans le secteur de la justice. D'ailleurs, l'Algérie est considérée comme le pays qui a le plus grand nombre de magistrates et d'avocates. Aujourd'hui, ce secteur s'est enrichi avec d'autres filières où les femmes ont fait une percée notable telles que les notaires, les commissaires priseurs et les huissiers de justice. Toutefois, il y a les femmes qui rendent la justice et celles qui la subissent. Le problème de ces dernières réside en matière de statut du personnel où il y a un article pernicieux, celui qui interdit à la femme divorcée avec enfants de se remarier. Quand on fait une analyse, on se rend compte que la femme est entièrement soumise aux desideratas du juge et du mari. Si elle se remarie, elle perd la garde des enfants et du logement. Je propose qu'un quota soit mis sous la coupe du juge des statuts personnels pour que les femmes divorcées retrouvent leur dignité et là l'Etat doit jouer le rôle interventionniste pour régler définitivement ce problème afin de prémunir ces femmes des problèmes sociaux ». Mme Amina Chouikh cinéaste : « Ouvrir les sections de cinéma dans les écoles » « Une demi-journée représente peu de chose pour mettre en avant ce que la femme a réalisé. Pour moi, c'est beaucoup plus symbolique qu'autre chose. En ce 8 Mars, mes pensées vont aux femmes qui habitent les régions enclavées ou dans l'Algérie profonde. Il n'y a qu'à voir la scolarité des petites filles interrompue à cause des longues distances qui séparent l'école de la maison. Par contre, on ne stoppe jamais la scolarité des garçons. L'autre problème que je veux soulever est le nombre de femmes avec enfants qui squattent les grands boulevards. Cela nous interpelle à plus d'un titre. Pour revenir à ma profession, je dirais combien y a-t-il de femmes cinéastes pour assurer la relève ? Je profite pour suggérer l'ouverture de sections cinéma dans les écoles pour que les jeunes s'intéressent à ce métier ». Mme Idami Messaouda chorégraphe : « Combien de femmes chefs d'Etat ? » « Le 8 Mars pour moi ne signifie rien car la femme algérienne a tout donné, que ce soit avant la Révolution, pendant et après. Même après l'indépendance, elle a continué à se sacrifier pour la patrie, les enfants, le travail etc. Je peux dire aussi que cette journée est une halte pour reconnaître l'importance des acquis même si les objectifs ne sont pas atteints comme par exemple sa représentativité dans les instances de l'Etat. A l'échelle internationale, combien de femmes sont présidentes de la République ? Je pense qu'il reste beaucoup à faire pour atteindre l'égalité parfaite entre les deux sexes. Toutefois, la femme algérienne par rapport à d'autres femmes dans les pays africains et arabes peut s'enorgueillir de certains acquis ». Mme Ait Zai juriste et présidente du Centre d'information et de documentation sur les droits de l'enfant et de la femme (CIDEF) : « Changer les mentalités pour asseoir l'égalité des deux sexes » « C'est un moment pour faire le bilan de nos acquis et de ce qui reste à faire. Il faut axer, actuellement, sur la place de la femme au sein de la famille (privé) car dans l'espace public l'égalité est consacrée. C'est ce chapitre qu'il faut revoir en mettant fin à la discrimination entre le frère et la sœur en matière d'héritage. Dans le témoignage (deux femmes pour un homme) en cas de divorce. Suppression de tuteur dans l'échange de consentement. Le tutorat sur la personne de l'enfant qui ne doit pas être seulement du ressort de l'homme. Pour tout cela, on propose à ce que les dispositions du code de la famille soient changées. Ensuite, il faut sensibiliser les mentalités des citoyens pour plus d'égalité entre les deux sexes ».