Battu de justesse aux législatives du 7 mars dernier, Nour Al-Maliki, le Premier ministre sortant, rue dans les brancards. Il conteste la victoire de Lyad Allawi, son rival. « Nous n'acceptons pas ces résultats, bien sûr, ils ne sont pas définitifs », dit-il. Une certitude. Iyad Allaoui l'ancien Premier ministre (juin 2004-avril 2005) n'aura pas la partie facile : sa liste d'Union nationale (Irakiya) ne devance celle de l'Alliance de l'Etat de droit de Nouri al-Maliki qui crie à la fraude électorale que de deux sièges au Parlement (91 contre 89). « Il y a eu une fraude évidente et ce mépris du peuple irakien aura des conséquences fâcheuses », prédisent les partisans du Premier ministre actuel pas « certains » que leurs candidats lésés déposeront des recours dans les délais si leur «chef» maintient son rejet du verdict de la commission électorale jusqu'à la formation d'une «coalition au parlement» avec les « faiseurs de rois » : l'Alliance nationale irakienne, un bloc chiite (70 sièges) et l'alliance Kurdistania, qui regroupe les partis kurdes du Nord (43 sièges). Al Maliki qui a agité l'épouvantail d'un « retour à la violence » si la commission électorale lui refuse un «nouveau décompte manuel» semble avoir trouvé une parade pour garder son poste après le satisfecit décerné par les Etats-Unis au scrutin. A sa demande, la Cour suprême a interprété l'article de la Constitution qui stipule que le président de la République confie au « candidat du plus large bloc à l'assemblée la formation du conseil des ministres ». Autrement dit, si Al Maliki réussit à former une coalition avec l'alliance irakienne ou l'alliance kurde, il pourrait être chargé de former le prochain cabinet. UNE CONSTITUTION, DEUX LECTURES Iyad Allawi qui redoute une entente de son rival avec ces deux blocs -elle ruinerait ses ambitions- interprète autrement la Constitution. «Le bloc qui a remporté le plus de sièges est celui qui est chargé de former le gouvernement même s'il n'a gagné que d'une demi-personne (...) Le peuple a choisi le Bloc irakien pour être la base du dialogue avec les autres», martèle-t-il. Comme s'il était engagé dans une course contre la montre, pour tordre le cou à l'attitude sectaire d'Al-Maliki qui menace de précipiter le pays dans une guerre confessionnelle, il a chargé Rifaa al-Issawi, le vice-Premier ministre sortant, un sunnite, de mener, dès la proclamation des résultats, des «discussions» avec l'ensemble des partis «qu'ils aient gagné ou non» pour former rapidement un gouvernement «fort capable de prendre des décisions qui servent le peuple irakien et permettent à l'Irak d'atteindre la paix et la stabilité et de reprendre sa place dans le monde arabo-islamique et au sein de la communauté internationale». «La liste Irakia ouvrira son cœur à toutes les forces politiques et à tous ceux qui veulent bâtir l'Irak. Nous enterrerons ensemble le communautarisme politique », dit-il sur la chaîne Al-Arabiya invitant le Koweït, l'Arabie Saoudite, la Turquie, la Jordanie, la Syrie et l'Iran à prendre la main de la fraternité que leur tend l'Irak « sur la base de la poursuite des relations positives et de non-ingérence dans les affaires intérieures». Sombres perspectives en Irak ? « Il y aura probablement plus de violence après le scrutin législatif », a prévenu récemment le président américain, Barack Obama.