La pièce du grand écrivain Mouloud Mammeri «Le fœhn» est savamment reprise par le metteur en scène Djamel Abdelli du Théâtre régional de Bejaïa. Longtemps inédite, Le Fœhn, dont l'action est tirée de la Bataille d'Alger, a été mise en scène pour la première fois par Jean-Marie Boëglin en 1967, jouée par des comédiens de grande renommée à l'image de Keltoum et Sid Ahmed Agoumi. Notons que le théâtre régional de Bejaïa présente au TNA cinq de ses productions théâtrales du 1er avril jusqu'au 6 avril 2010, qui entrent dans le cadre de l'initiative Carte blanche initiée par le Théâtre National Algérien. Réalisé en deux mois, ce spectacle d'une durée d'une heure et quart est interprété par dix comédiens et scindé en plusieurs tableaux. Pour tout décor, une simple scène plate. L'assistance est plongée dans une ambiance typiquement particulière en lui ouvrant une lucarne sur la littérature. Une littérature bien proche du réel. Avec un art consommé de l'interprétation, les dix comédiens ont su créer l'illusion du réel et raconter avec talent en usant des techniques proches de celles des «Goualine», les aventures d'un certain Tarik, un jeune Fidaï algérien qui s'apprête à commettre un attentat contre un colon, commandant de l'armée française. Malgré sa ruse, Tarik est capturé par les colons pour lui arracher des aveux. Ne cédant pas à cette pression, Tarik est torturé mais reste muet. Il est défendu et accusé par différents protagonistes mais il est finalement condamné à mort. Même si cette pièce est interprétée en expression amazighe et française, le public a non seulement assimilé les messages de ce texte mais a également vibré pour cette riche interprétation, de ce savoir-faire et de ce jeu théâtral. Cette œuvre lie rêve et fureur, passion et réalité qui se tissent le visage d'une génération traquée démunie et qui existe pourtant par l'ardeur de son amour et sa résistance à la violence. C'est tel un devoir de témoignage à la manière du théâtre que d'évoquer notre époque par une fantaisie qui joue à mettre en relief des concepts et des événements qui se sont succédé à travers le temps et l'espace. M ise en scène par Djamel Abdelli d'après un texte de Mouloud Mammeri, la pièce reflète également le niveau de l'effort fourni par cette équipe pour acquérir le langage théâtral et le domestiquer au profit de l'expression de questions sociales et autres. Le metteur en scène a cependant annulé des scènes qu'il a jugées moins importantes que d'autres, comme celles des négociations avec l'ONU. Attraction de cette programmation, l'introduction d'une cantatrice, Mounia Aït Meddour. Dans un décor soigné, sur scène, la cantatrice ne chante pas en play-back, mais en direct. Dans une longue robe de couleur blanche, une coiffure chic et soft, un maquillage pastel, un sourire remarquable, Mounia Aït Meddour nous berce de sa douce voix. Elle interprète des passages musicaux qui savent si bien parler d'amour et de chants patriotiques. Sa musique mêle orchestration classique et arrangements modernes. Un show à couper le souffle. Ce spectacle haut en couleurs et dans une tenue parfaite est relevé par l'harmonie de l'interprétation musicale. Diplômé de l'ancien INADC (Institut national des arts dramatiques et de la chorégraphie) en 1991, Djamel Abdelli active actuellement au Théâtre régional de Bejaïa. Il participe en tant que comédien dans deux pièces pour enfants «Hanou» produite par la troupe indépendante «Massyl» de Annaba (1993) et «Fita Bent El Allouane» du TR Bejaia (1994). Il mettra en scène plus tard, «Thirga», «L'écharde», «Les damnés», «Voix des femmes» de Kateb Yacine, «La musique adoucit les mœurs», «La déraison». En projets, Djamel Abdelli compte réaliser une comédie musicale sur Fadhma N'ssoumer.