La crise qui secoue la Grèce et bientôt, à travers l'effet domino, plusieurs autres pays de l'Europe, aura des retombées certaines sur beaucoup de pays dont le nôtre. Nous ne faisons pas partie de la zone euro mais nous en sommes un grand partenaire économique et financier. Des effets positifs d'abord par ce que « la baisse de l'euro fait baisser la facture d'importation » mais aussi des effets douloureux de l'autre côté à travers « la dépréciation de nos réserves de change » dont les 42 % sont libellés dans cette monnaie. L'Algérie, à titre de rappel, fait plus de 60% de son commerce avec l'Europe. C'est le constat, en tout cas, que dressent la plupart des économistes et financiers, dont ceux que nous avons contactés. Pour M. Salah Mouhouhi, expert financier international, il est tout à fait normal que toute dévaluation d'une monnaie, ici l'euro, « contrarie la reprise économique ». Bien qu'en contrepartie, l'appréciation du dollar sera « une bonne chose pour nous », la dévaluation de l'euro aura « un impact sur les réserves de change de notre pays ». Les deux spécialistes tentent une lecture sur la genèse de la crise qui a commencé par le non-respect de la plupart des pays membres de la zone euro des critères de Maastricht (qui limitent à 3% le déficit budgétaire) et prédisent comme M. Mihoubi « beaucoup d'incertitudes », en ce sens que les politiques d'ajustement qui consistent à limiter les dépenses publiques ont « un coût économique et social élevé ». Pour l'Algérie, c'est la manière de riposte qui se pose aujourd'hui. Alors que M. Serai, autre expert financier, recommande aux responsables de la Banque d'Algérie et au ministre des Finances une sorte de « veille, une alerte pour mieux évaluer la situation », M. Mihoubi estime que l'Algérie devra penser « à prendre contact direct avec les Etats européens qui empruntent à des taux d'intérêt élevés » pour leur proposer les montants souhaités. Une manière de compenser les taux de placement moins rémunérateurs actuels. M. Serai, expert et consultant international qui n'est pas vraiment enthousiasmé par une telle alternative, explique qu'il est « difficile de prêter aux pays européens », évitant du coup de s'attarder sur les arguments d'une telle opposition et si elle serait due à la profondeur de la crise, à une hypothèse liée à l'insolvabilité ou autre. Pour lui, l'Algérie ne peut s'intéresser qu'à « un appel de fonds du FMI », le débat est de la même nature que « celui que nous avons eu sur les fonds souverains », dit-il. Les autorités monétaires devraient faire attention à la crise qui s'installe en Europe, « car nous travaillons avec 600 banques européennes dont 130 environ de premier ordre » et qui ne sont pas à l'abri de ce qu'on appelle « l'effet de domino et d'escalier », met en garde M. Serai. Pour un autre économiste, les autorités monétaires ont toujours su instaurer, via la Banque centrale, « un équilibrage entre nos flux des exportations qui sont libellés en dollar presque à 100 % et nos importations », il y a des risques dans les placements et « on doit faire un arbitrage entre sécurité des placements et rentabilité », résume M. Mourad Goumiri qui veut nous dire que ces deux choses ne vont pas forcément de pair. Des fois on perd, des fois on gagne. Au-delà de la problématique de l'effet direct de la situation monétaire de l'Europe sur les Etats membres eux-mêmes, et par delà ses partenaires économiques, c'est sa durée, son endiguement à travers la riposte des institutions de l'Union européenne qui reste à déterminer car cela va certainement retarder la reprise économique mondiale tant attendue.