Justice Le dauphin du président français Jacques Chirac, l'ancien Premier ministre, Alain Juppé, a été condamné, hier vendredi, pour malversations. Un jugement qui hypothèque son futur politique et ouvre une grave crise pour la droite française. Alain Juppé, 58 ans, chef de file du parti du président Chirac, l'Union pour un mouvement populaire (UMP), et candidat potentiel à sa succession en 2007, a été condamné à 18 mois de prison avec sursis et à une peine d'inéligibilité de 10 ans. Celui que la presse décrit comme un homme brillant, mais froid, et qui s'est consacré ces dernières années à sa mairie de Bordeaux, dans le sud-ouest, a fait appel ? avec effet suspensif ? de ce jugement, rendu par le tribunal de Nanterre, près de Paris. Il avait prévenu qu'il se retirerait de la vie politique s'il était condamné, mais son destin politique devrait rester incertain jusqu'au jugement d'appel qui risque de prendre plusieurs mois, voire plus d'un an. Juppé était accusé, avec 26 coprévenus, d'être impliqué dans le financement, entre 1983 et 1995, de sept permanents de son parti d'alors, le RPR, par des fonds de la ville de Paris, dont il était le responsable financier. Jacques Chirac était à l'époque maire de la capitale. Il a toujours clamé ne rien savoir de ce financement illégal et d'y avoir mis fin dès qu'il en avait eu connaissance. Le verdict plus lourd que la requête de l'accusation rend son maintien dans la course à la présidentielle de 2007 tout à fait incertain et ouvre le champ au ministre actuel de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, qui ne cache pas ses ambitions présidentielles. Il risque également de provoquer une guerre de succession à la tête du parti du président Chirac, l'UMP, à un moment où il est engagé dans la campagne pour les élections régionales de mars. Alain Juppé, qui a été ministre des Affaires étrangères de 1993 à 1995 sous le président François Mitterrand, est resté flegmatique, au premier rang de la salle d'audience, à la lecture du jugement. Son avocat, Francis Szpiner, a estimé que cette condamnation était «critiquable et injuste», s'en prenant à la justice qui veut se «mettre au-dessus de la politique sur la base d'un dossier dont les éléments sont contestables». «Le tribunal a voulu écarter M. Juppé de la vie politique», a poursuivi l'avocat. Dans ses attendus, le tribunal estime que «la nature des faits commis est insupportable au corps social comme contraire à la volonté générale exprimée par la loi» et que M. Juppé a «trompé la confiance du peuple souverain».