La décision du chef de l'Etat, annoncée il y a quelques mois, d'effacer les dettes des agriculteurs a suscité un sentiment de soulagement au sein de ces derniers. Ils pouvaient entrevoir l'avenir, le leur et, partant, celui de tout le secteur avec moins d'angoisse. Il s'avère cependant que tout le monde ne joue pas le jeu, d'où une confusion et un retard dans l'application de la décision. Seule la Caisse Nationale de la Mutualité Agricole (CNMA) a répondu favorablement aussitôt que la décision a été prise par le premier responsable du pays, selon la Chambre Nationale de l'Agriculture. Tout à fait à l'opposé de la démarche de la CNMA, la Banque algérienne pour le développement rural (BADR) a «maintenu ses poursuites judiciaires et son harcèlement contre les agriculteurs mettant en avant une série de conditions pour clôturer ce dossier», affirme le président de la chambre agricole ce lundi matin sur les ondes de la chaîne III. Les conditions émises par la BADR sont, selon M. Mohamed Cherif Ould El-Hocine, notamment liées à la présence des cartes d'agriculteurs, à la filière, au volume des dettes, et «à un certain nombre d'éléments qui ne dénotent pas de beaucoup de professionnalisme de la part de cette banque», fait remarquer M. Ould El-Hocine. La BADR, à en croire l'orateur, exclut volontairement certaines filières et créneaux d'activité de cette opération. Or, «la décision annoncée par le président de la République fait état de l'effacement de toutes les dettes sans exception ainsi que le gel de toutes les poursuites judiciaires», insiste M. Ould El-Hocine. Les filières exclues de cette démarche sont, entre autres, le forage des puits, les chaînes d'abattage, les chambres froides et les huileries. L'interlocuteur déplore l'opacité qui a entouré le traitement des dossiers et le fait que la Chambre de l'agriculture, ainsi que l'Union Nationale des Paysans ne soient pas associées au déroulement de cette opération. L'effacement de ces dettes pourrait pourtant permettre, de son point de vue, de relancer le secteur de l'agriculture qui a beaucoup souffert de la sécheresse et de la décennie noire. Une lecture que ne semble pas partager les institutions financières qui, selon lui, n'ont pas adhéré à l'engagement de l'Etat. La volonté politique aujourd'hui est de placer l'agriculture au cœur du développement économique. Pour atteindre cet objectif, la Chambre de l'Agriculture suggère avant tout d'aplanir les problèmes de gestion et d'administration de l'ensemble de ce secteur. La gestion des dossiers du monde agricole accuse un retard considérable par rapport aux décisions politiques, relève-t-il. «Nous n'avons jamais eu autant de mesures structurelles pour réengager l'agriculture dans l'investissement et la placer prioritairement au cœur de l'économie nationale», reconnaît pourtant le président de la Chambre avant de passer en revue les éléments essentiels, de son point de vue, à la relance de ce secteur. Pour lui, le plus urgent est de définir une véritable politique de financement du domaine en impliquant l'ensemble des institutions financières. «L'épargne agricole a certes connu des améliorations mais cela reste insuffisant pour en faire le moteur de la relance économique de l'agriculture», dit-il. Le deuxième point vivement défendu par M. Ould El-Hocine, en plus de la formation et du recyclage des agriculteurs, est leur besoin de s'appuyer sur le soutien de l'Etat et les crédits bancaires.