Engouement n Les restaurateurs éprouvent bien des difficultés à faire face au rush de la clientèle qui a préféré attendre la dernière minute pour se présenter et acheter le ticket du f'tour. «Belaâkel, belaâkel, kayen makla (patience, patience, il y a de la nourriture pour tout le monde)», lance l'un d'entre eux, un homme d'une cinquantaine d'années aux cheveux grisonnants, devant l'insistance de deux jeunes à avoir leurs tickets le plus rapidement possible. Debout derrière son comptoir, il fait de son mieux pour répondre aux demandes qui n'arrêtent pas d'être exprimées. «Moi je veux une bouteille de limonade bien glacée, si vous n'en avez pas, je préfère m'en aller», lui demande un homme d'un âge avancé accompagné de sa femme. Et un autre client d'exiger : «Moi je veux un plat ch'titha dinde». «Kayène el-bourek ? (vous avez du bourek ?)», l'interroge encore un autre. A quelques minutes de l'adhan, la tension est montée d'un cran au niveau des trois restaurants. Les clients munis de leurs tickets s'attablent et demandent, presque machinalement, à être servis. «Il manque du pain par ici», «vous ne m'avez pas donné de dattes», «elle est où ma bouteille de limonade ?», «un peu de harissa si vous en avez», peut-on entendre ça et là. Après avoir été servie, une jeune fille assise aux côtés d'une dame et de sa fille en bas âge, interpelle soudainement le gérant du restaurant dans un français impeccable : «Il n'y a pas de bourek ?» «Vous avez payé une chorba, un plat de résistance et une bouteille de limonade seulement madame», lui explique calmement le restaurateur. «Oui, mais tous les restaurants d'Alger le proposent gratuitement durant ce mois», riposte la jeune fille qui a du mal à contenir ses nerfs. «Je ne demande pas de faveur, c'est juste une question de principe», enchaîne-t-elle devant l'ahurissement des présents. Il reste à peine deux minutes pour que le muezzin annonce la rupture du jeûne et les serveurs font tout leur possible pour satisfaire à temps tout le monde. Une tâche qui, il faut bien le souligner, est loin d'être facile car les sollicitations sont à la fois nombreuses et «pressantes» : chacun veut être servi en priorité. Toute la gare est branchée à l'heure du f'tour. «Allahou Akbar (Dieu est Grand)» ! L'appel à la prière d'Al-maghrib instaure un silence religieux, interrompu en permanence par le bruit des…cuillères ! Il est 19h 34. Après avoir ingurgité quelques dattes, un groupe de jeunes prend la direction de la salle de prière du coin qui commence à se remplir progressivement. A l'exception des trois restaurants, tous les autres commerces sont fermés pour le moment.